240 SOUVENIRS DE LA HAUTE-ALBAN1E. allé à Trieste d’où il rapporta des machines pour son moulin et l’exploitation de sa ferme ; mais il eut contre lui la superstition des paysans et la haine des partisans de l’ancien régime : on fit exprès de lui détériorer ses machines ; il n’avait pas de mécanicien pour les réparer, elles sont actuellement inutiles sous un hangar. On dit que son téké a des revenus fort importants, d’autres m’ont affirmé que la vie de ces religieux était modeste et que bien rarement à la fin de l’année la communauté avait un excédent de recettes. 11 est difficile de sortir la vérité des exagérations orientales. De même que toutes les communautés religieuses, ils doivent très probablement chercher à apitoyer le public en parlant de leur pauvreté. Ils ont dans les hodjas des ennemis ardents, toujours disposés à les dénigrer, les qualifiant de vagabonds, leur faisant un crime de leur tolérance religieuse. Leurs tékés n’ont pas l’aspect austère de nos cloîtres, dans la plupart desquels la mort semble l’idée dominante ; au lieu d’y creuser sa fosse, 011 y bâtit sa vie, on semble seulement préoccupé d’y vivre tranquille du fruit de son labeur. On ne peut nier qu’ils travaillent, les propriétés des tékés sont en général bien exploitées; on leur reproche de boire de l’eau-de-vie, mais combien de musulmans en font, en se cachant, un usage immodéré. La porte d’un téké est toujours ouverte aux voyageurs, qui sont assurés d’y recevoir l’hospitalité. Les ennemis des begtaschis, qui parlent d’eux avec mépris, ne se font cependant pas scrupule d’entrer chez eux et d’y manger leur pain, quitte à maudire la main qui le leur a offert. C’est toujours la lutte entre Mahomet et Ali. Les begtaschis de Croïa prient peu. Quand ils se réunis-