304 SOUVENIRS DE LA HAUTE-ALBAN1E. séculaires, s’est durillonnée de résignation et d’accoutumance; ils sont exemptés d’impôts, de service militaire, mais chaque famille est tenue au paiement annuel d’une somme de 30 piastres (6 fr.), argent destiné à l’entretien de quelques gendarmes ; les Albanais musulmans ne paient rien, mais doivent le service en temps de guerre. Les chrétiens n’ont pas de chefs pour les protéger ; ils ont bien des délégués dans les conseils ou dans les tribunaux, mais ils sont pro forma ; aucun d’eux n’est en état de lire ce qu’on lui donne à signer, et n’oserait élever la moindre objection. Ils n’ont pour prendre leur défense que leurs prêtres; mais le haut clergé est de nationalité étrangère, ainsi que la plupart des religieux. Us n’ont pas eu la bonne fortune d’avoir comme les Grecs, les Bulgares, les Arméniens, dans les autres parties de l’Empire, un clergé national et patriote. Ces clergés ont pu mériter une partie des accusations diri gées contre eux ; mais ils n’en ont pas moins eu l’inappréciable qualité, et particulièrement le clergé grec, de maintenir vivace l’idée de patrie et de nationalité, de souffrir et de lutter pour elle : ils ont eu l’admirable persévérance d’en entretenir le sentiment, comme ils entretenaient les lampes dont la lueur vacillante éclairait leurs iconostases et dont la petite flamme ne doit jamais s’é teindre ; ils y sont parvenus, en dépit des ouragans qui s’abattaient sur eux. Dans la Haute-Albanie, le clergé et les religieux appartiennent encore en général à des ordres étrangers, la plupart italiens ou dalmates ; recevant de l’étranger les subsides dont ils vivent, ils sont les protégés d’une puissance étrangère, enfin, leur patrie n’est pas de ce monde. Ils rendent néanmoins aux Albanais de réels services, dans la pénible situation où ils se trouvent placés, mais ils n’ont