21 I.’HISTOIRE DES ÉTUDES SLAVES EN ROUMANIE 213 et d’autres slavisants renommés, étant élu membre d’honneur des Académies de sciences russe, bulgare1 et serbe. Le quatrième représentant de cette génération est Alexandre Cihac, fils du médecin Iacob Cihac, d’origine tchèque, venu d’Allemagne à Iassy (1825), où il a joué un rôle important dans le développement de la médecine et des sciences naturelles 2. Faisant ses études en Allemagne, Alexandre Cihac a consacré ultérieurement une bonne partie de son activité scientifique à l’étymologie roumaine, en accordant une place importante aux éléments d’origine slave. Quoiqu’il ait également composé d’autres ouvrages, quelques-uns d’entre eux publiés dans « Convorbiri literare » 3, Cihac s’est imposé surtout comme auteur du premier dictionnaire étymologique roumain : Dictionnaire d’étymologie daco-romane. I. Éléments latins comparés avec les autres langues romanes, Francfort s/M., 1870; II. Éléments slaves, magyars, turcs, grecs-modernes et albanais, 1879. Souvent cité pendant presque un siècle, loué et à la fois critiqué, le dictionnaire a suscité de vives discussions à l’époque et plus tard, surtout à cause de la statistique communiquée par Cihac dans la préface du deuxième volume, selon laquelle les mots d’origine latine dans la langue roumaine constitueraient 1/5 du vocabulaire de celle-ci, pendant que les emprunts slaves représenteraient presque 2/5 (p. VIII ; voir aussi les chiffres données par Cihac à la page XIII: «environ 500 mots latins, 1000 mots slaves », etc.). Cette erreur de l’auteur lui-même, maintenue, par les « précisions » faites en 1920, par S. Puscariu — qui a compté (d’une manière incomplète d’ailleurs) seulement les mots de l’index 4 — a été corigée, en faveur de Cihac lui-même, à peine dernièrement, lorsque Mircea Seche a eu l’idée de compter vraiment tous les mots roumains expliqués par lui (mots de base et leurs dérivés) et de refaire la statistique 5. En effet, Cihac a enregistré dans son dictionnaire 17.645 mots (outre les variantes et les toponymes) parmi lesquels : plus de 45%, respectivement 8.038 — d’origine latine (et leurs dérivés), moins de 35%, respectivement 6.141 mots — d’origine slave (et leurs dérivés), le reste étant d’autres origines (évidemment, selon les données étymologiques de Cihac). Or, ces chiffres annulent définitivement la statistique approximative de Cihac, qui lui a valu, on le sait, tant de critiques, qui s’avèrent ainsi être injustifiées, car il n’avait pas bien compté son propre matériel lexical. La plus sévère critique fut celle de B. P. Hasdeu, qui a eu ainsi l’occasion de 1 Voir N. 2 e t e v , Sur les relations entre Bogdan P. Hasdeu et les savants bulgares à la fin du XlX-ème siècle, « Etudes balkaniques », I, Sofia, 1964, p. 139—145. 2 Voir Ilie Bàrbulesco, L'esprit tchèque et les premiers essais scientifiques modernes en Roumanie, dans Sbornik praci I. Sjezdu slovanskÿch filologû v Praze 1929, Svâzek II. PfednaSky, Prague, 1932, p. 3—9; Dr. Paul Pruteanu, Noi date biografice despre Ale-xandru Cihac, Rsl, VI, 1962, p. 269—270; Idem, Iacob Cihac, Bucarest, 1966 (Il semble qu’-Alexandre Cihac ne soit que le fils adoptif de Iacob Cihac). 3 Surtout des comptes-rendus de certains ouvrages de Hasdeu (CL, 1875, n° 9 ; 1876, n° 10; 1879, n° 13; 1880, n° 14). Sur d’autres ouvrages voir l’article de D. B u g e a n u, Concepfia lingvisticâ a lui Alexandru Cihac, « Limba românâ », XVI, 1967, n° 3, p. 225—236. 4 Locul limbii române între limbile romanice (Acad. Roum., Discours de réception), Bucarest, 1920, p. 39. 5 Schitd de istorie a lexicografiei române, I, Bucarest, 1966, p. 102—131.