3 CONTACTS ENTRE L’HISTORIOGRAPHIE ROUMAINE ET TCHÈQUE 411 tout particulièrement pour ceux que la domination ottomane opprimait, ira s’augmentant.1. Aussi bien, est-il indiscutable que jusqu’à ce moment-là, les pays européens connaissaient à peine ces peuples et ce n’est pas, par un simple hasard, que Johann Thunmann affirmait en 1774 qu’aucun des peuples occidentaux n’était aussi peu connu que les Albanais ou les Roumains. 2 Thunmann, le premier, brise — il y a quelques deux cents ans — les moules des narrations médiévales, et formule avec une saisissante netteté la thèse de l’évacuation de la Dacie par les Romains, que nous continuons de faire nôtre: „Man darf nicht behaupten, précise Thunmann, dass die alle von dem Aurelian nach dem jenseitigen Ufer der Donau versetzt worden: natürlicher Weise blieben in einem so ungeheueren so gebirgigten Lande zurück. Bei den Ueber-schwemmungen der Vandalen, Gothen, Hünen, Gepiden, Slaven, Avaren und Bulgaren flohen sie nach den Gebirgen, die ihre Vertilgung verhinderten“3 Le problème fondamental qui se pose à présent est celui de la continuité de l’élément romain en Dacie Trajane. On vient à se demander—et la réponse définitive n’a pas été donnée — si l’empereur Aurélien a pu faire évacuer vers le sud, entre 270 et 272 de notre ère, toute la population daco-romaine habitant les contrées nord-danubiennes. Cet événement historique d’il y a 1700 ans a eu des résonances profondes dans les documents de l’Antiquité et les textes historiques du Moyen-Age et a constitué la racine primordiale de la dispute menée autour des origines du peuple roumain. En rapport direct avec ce que nous venons de dire, Edward, Gibbon fait paraître en 1776 une synthèse très intéressante de l’histoire de l’Empire romain où l’abandon de la Dacie nord-danubienne par Aurélien ne constitue pas un momsnt de première importance dans le contexte des événements historiques dont il fait le point. L’historiem anglais se contente d’affirmer ---• » • vammPB— 1 Expression de cet intérêt: la parution de publications de caractère plus ou moins informationnel, comme par exemple: « Histoire de la Moldavie et de la Valachie avec une dissertation sur l’ètat actuel de ces deux provinces », par M. C ( a r r o ), Jassy, 1777 ou (St. Rai-c e v i c h ), Osssrvizioni storiche, naturali e politiche intorno la Valachia e la Moldavia, Naples, 1783. Suivant le modèle de certains chroniqueurs du Moyen-Age, ce dernier auteur présente tout ensemble les trois pays roumains: «La Transsilvania, la Valachia e la Moldavia erano dalli rom mi compresse sotto il nome generale délia Dacia“ (p. 6) D’un style agréable et sobre, la publication de Raicevich a joui d’une large circulation, que redoublait probablement aussi, à ce mmsnt, le besoin d’informations ressenti par les cercles politiques d’Occident. D’ailleurs, un an après sa première parution (en italien), la publication de Raicevich est éditée en allemand sous le titre : «Bemerkungen über die Moldau und Wallachey in Rücksicht auf Geschichte, Naturprodukte und Politik, Vienne, 1789. Une nouvelle traduction de la même publication fait son apparition, un an après, en 1793, sous le titre: Geschichte, natürliche Beschaffenheit u. Verfassung der Wallachey u. Moldau, aus dem italienischen übersetzt von Herrn Prof. Piehl, Strassbourg (1790), p. 227. Enfin, un peu plus tard, une nouvelle édition italienne paraissait, dont le titre était quelque peu renversé: Viaggio in Valachia e Moldavia, con osservazioni storiche, naturali e politiche, Milano, 1833 ; concomitamment, une version française faisait aussi son apparition intitulée: Voyage en Valachie et en Moldavie, avec des observations sur l'histoire, la physique et la politique, traduit de l’italien par I. M. Lejeune, Paris 1822. 2 Cf. Untersuchungen über die Geschichte der östlichen europäischen Völker, I. Theil Leipzig, 1774, p. 172 (voir le chapitre „ Uber die Geschichte und Sprache der Albaner u. der Wla-chen", p. 171 — 366). 3 Ibidem, p. 361.