leurs qu’il s’agirait plutôt d’un fragment de notes, tandis que Bartenev en fait un simple article écrit « à l’intention du mouvement révolutionnaire moldave» 52. Enfin, Sslinov affirme que Kirdjali, est une oeuvre d’art que Pouchkine a appelée « récit » sans tenir compte des règles poétiques dé son temps 53. Considéré à la lumière des normes critiques actuelles le récit de Pouchkine se situe en dehors des formes avec lesquelles nous a familiarisés le manuel de l’Histoire littéraire. Ce serait une erreur de. le considérer autrement, car de cette façon nous aurions en vue un autre objet. Rien ne nous permet d’apprécier à notre manière une oeuvre littéraire parue en 1834, par conséquent à une date à laquelle il ne pouvait encore être question d’un classement net des genres littéraires. C’est pourquoi nous ne pouvons le considérer que comme un point de transition dans le courant continu de la littérature 54 et en fonction de la manière même dont il a été perçu par l’auteur et par ses contemporains Toute autre appréciation porte à côté de la valeur réelle du récit. Son intégration dans la tradition poétique du temps s’impose d’autant plus que son thème même et sa valeur tant sociale que morale sont d’essence romantique. Il nous suffira de rappeler avec quelle chaleur et quelle sympathie Pouchkine s’est penché sur la vie de son héros pour comprendre toute la ferveur, dont son âme était pleine. Après son arrestation Kirdjali fut envoyé à Jassy et livré au pacha, parce que le commandant russe « n’a pas tenu compte du côté romantique des haïdouks » (épisode 5) et au cours du dernier épisode (6) le poète s’attendrit sur le sort du « pauvre Kirdjali ». Ce sentiment d’attendrissment, exprimé sous une forme d’indubitable sincérité, prête au contenu du récit un sentiment de chaude sympathie pour les exploits que punit la morale sociale. D’autre part, la division du récit en épisodes est sûrement due an fait que celui-ci n’est qu’un chapitre d’une oeuvre plus vaste, dont le plan a été retrouvé parmi les manuscrits du poète. «...Kirdjali. Les Emigrants. La bataille de Sculeni. La pendaison de. Cantacuzène. Hoicevskij. Navrockij. La bataille. Les Albanias à Kichinev55. Il ressort de ces annotations que Pouchkine avait l’intention de composer une oeuvre plus vaste et que, pour des raisons restées inconnues, il n’a pu l’achever; tout comme il n’a pas terminé non plus le fragment en vers intitulé lui aussi «Kirdjali»56. La publication de l’œuvre dont nous nous sommes occupés et qui porte le sous-titre de «récit » ajouté par le poète démontre d’une manière évidente que ce dernier avait foi en son œuvre et qu’il était convaincu de sa valeur artistique. Nous croyons qu’à sa parution, le récit de Pouchkine a rempli la même fonction artistique à que n’importe quelle autre œuvre similaire de la littérature actuelle et cela tout en ayant le style d’une véritable œuvre d’art. L’intégration de ce récit dans la litérature universelle constitue un fait d’une importance artistique comparable à celle de n’importe lequel des autres 52 Selinov, ouvr. cité, p. 97. 53 Ibidem, p. 110. 61 Jan Mukarovskÿ, Poldkova vzneSenosl pflrody dans « Kapitoly z éeské poetiky », Prague, 1941, II, p. 116 sq. 56 E. D v o i ce n c o, Pacchiti $i Romtnii, Bucarest, 1937, p. 31. 66 A. S. Pouchkine, ouvr. cité, I, p. 511. 122