«...En Moldavie de grandes bandes de voleurs composées des Turcs de la population locale et d’individus venus d’Autriche, ont fait leur apparition. Le plus connu de ces brigands moldaves est ce même Georges Kirdjali qui, en février dernier, a dévasté la petite ville de Sculeni. Kirdjali a été envoyé en Moldavie d’où il s’est évadé en compagnie des ses gardiens turcs. Maintenant il a recommencé à piller.39 » Les appréciations portées par le général Inzov sur les exploits de Kirdjali nous intéressent dans une plus faible mesure. Nous retiendrons cependant le fait qu’il existait à cette date un brigand portant ce nom. Rappelons aussi deux rapports du Consul de Prusse datés du 27 Juillet 1823 et dont la valeur documentaire est nulle. Dans l’un de ces rapports il est dit que Kirdjali Georges, bulgare, vivant de rapines est finalement tombé aux mains du pacha de Silistrie, après avoir pris part à la révolution hétairiste. Le pacha avait donné l’ordre de le décapiter, mais Kirdjali se servit d’un stratagème fort connu, pour faire ajourner-son exécution. Enfin, dans un autre rapport, portant la même date, on trouve ce qui suit: le pacha de Silistrie a mis en liberté tous les hétairistes qui lui avaient été livrés, ne retenant que Georges Kirdjali et deux prêtres 40. Ainsi, même les cercles officiels étrangers s’intéressaient au sort de ce brigand. Sa renommée était si étendue, qu’il était très difficile de faire une distinction entre ses exploits réels et ceux que la légende avait grossis. IV. KIRDJALI DANS LE TEXTE DE POUCHKINE Alexandre Pouchkine fut le premier à s’intéresser aux légendes forgées autour des exploits de Kirdjali41. Pour des motifs non éclaircis encore, le grand écrivain russe n’a pas laissé un récit dans le véritable sens du terme. C’est pourquoi, pour mettre en lumière la division en épisodes de cette narration, nous allons présenter son contenu, accompagné d’un résumé des idées de chaque fragment, sans toutefois en faire une traduction 42. Quelques éléments descriptifs Pouchkine qui, dès le début de son récit souligne l’origine bulgare du brigand, affirme qu’en turc Kirdjali signifie « courageux »; Kirdjali avait répandu la terreur dans toute la Moldavie. Il avait pillé une nuit, en compagnie de l’albanais Mihalache, une colonie de bulgares. Après avoir mis le feu au village de deux côtés à la fois, ils avaient commencé le pillage. Kirdjali tuait et Mihalache 39 V. J a z v i c k i j, ouvr. cité, Cf. aussi V. 1. S e 1 i 11 o v, JJ,o numanufi npodoicepeAu noeucmu IlyiuKuna «Kupdoicajiu» dans « Zapiski istoricno-filologiënogo viddiJn », Kiev, (1927), XIII-XIV, p. 105-106. 40 Ibidem. 41 A. S. Pouchkine. floAHoe coôpanue conuHeHuü e uiecmu moMax, Moscou, 1936, IV, p. 287. 42 Les légendes créées autour de Kirdjali ont attiré l’attention de l’écrivain polonais Michel Czajkowski, qui publia en 1830 un long récit, dont le titre est le nom même de ce brigand. s* 115