chronographique. Le résultat de ces études peut se résumer dans la conclusion que toutes les chroniques russes du XlIIe au quinzième siècles, sauf celles des villes, représentant le point de vue des cnèzes et des «grands cnèzes» russes dans la période où la monarchie féodale renforce son pouvoir dans sa lutte avec les tendances particularisas de la noblesse propriétaire de «votchina». Ces chroniques sont une arme, aussi bien qu’un élément de propagande, destinées à consolider l’autorité des grands cnèzes opposés au morcellement féodal maintenu par la classe des boïars. Une partie de l’ancienne historiographie roumaine, et spécialement les historiens I. Bogdan et N. Iorga, considéraient les anciennes chroniques moldaves du XVe siècle comme ayant été écrites dans des monastères, donc dans un milieu isolé de la société,* par les moines ne pouvant avoir aucun contact avec les convulsions sociales et politiques agitant le pays. Ces historiens n’expliquaient nullement la nécessité pour la société de l’apparition de tels ouvrages, adoptant ainsi un point de vue contraire à la méthode marxiste, qui voit dans la production littéraire un écho des conditions ou des mouvements sociaux. Il est donc nécessaire aujourd’hui, à la veille de la réédition complète des anciennes chroniques slavo-roumaines, de les réexaminier tant du point de vue des textes littéraires slaves leur ayant servi de modèles, comme aussi des circonstances dans lesquelles elles furent écrites et des besoins auxquels elles répondaient en rapport avec le stade d’évolution de la société féodale de notre pays. Nous ne pouvons plus admettre aujourd’hui que la grande tourmente de luttes et de suffrances du peuple roumain de Moldavie, lutte pour l’indépendance contre les turcs et la lutte du prince contre les grands féodaux pour l’unification intérieure du pays, n’ait éveillé nul écho littéraire au sein de la société, en dehors des monastères perdus dans les montagnes, où les nouvelles du monde ne pénétraient qu’affaiblies et tronquées. HISTORIOGRAPHIE CHRONOGRAPHIQUE DE MOLDAVIE DANS LE CADRE DE L’HISTORIOGRAPHIE SLAVE. La critique historique de Roumanie d’avant 1944 estimait que les chroniques moldaves du XV-e siècle, quoique écrites dans la même langue que les chroniques slaves de Russie, de Bulgarie et de Serbie, sont nées isolément sans aucun rapport avec celles-ci, en d’autres termes elle n’arrivait pas à intégrer les origines de l’historiographie slavo-moldave dans le courant général du développement de l’historiographie en langue slave. D’après ces historiens les chroniques moldaves les plus anciennes écrites sur le territoire de la Moldavie dériveraient du développement des obituaires des monastères, sur lesquels étaient notés les noms des princes fondateurs et des membres de leurs familles pour les recommander aux prières proférées journellement devant l’autel. On avait eu spécialement en vue le plus ancien obituaire en langue slave, celui du monastère de Bistri^a 4. Une simple compa- 4 D. P. Bogdan, Pomelnicul mânâstirii Jiistrita, Bucarest 1941. Pour les opinions des historiens cités sur l’origine des chroniques moldaves censés dévier des obituaires cf. I-Bogdan dans ses introductions aux éditions citées plus haut dans une note précédente, et N. Iorga, Istoria literaturii romtnesti, I, 11-ème édition, Bucarest 1925, p. 125 — 131. 148