I. BOGDAN ÇI B. P. HASDEU 271 Des documents inédits prouvent que durant ces années Ioan Bogdan entretint une correspondance nourrie avec son maître de Bucarest qu’il renseigna sur ses progrès et auquel il demanda des conseils concernant d’orientation de ses études (cf. les annexes I — IV). En analysant les principaux ouvrages de Ioan Bogdan, l’auteur établit les rapports de filiation indéniables qui lient ceux-ci avec l’œuvre de son grand prédécesseur tant en ce qui concerne la méthode de recherche — que Bogdan améliora d’ailleurs à la suite de l’expérience acquise pendant sa spécialisation à l’étranger —, qu’en ce qui concerne les questions qu’il aborde, d’un point de vue critique, dès ses premiers travaux, parus en 1889 dans les Annales de l’Aca-démie Roumaine. La présence, dans les ouvrages de Ioan Bogdan, de certaines vues de Hasdeu peut être poursuivie, de même, dans Les anciennes chroniques moldaves jusqu'à Urechie, de 1891, volume dédié à Hasdeu et a D. A. Sturdza, ainsi que dans le volume Chroniques inédites concernant l'histoire de la Roumanie, de 1895, dédié à V. Jagic. Dans l’introduction au premier de ces ouvrages (1891) — dans lequel il publia les noveaux documents découverts à Kiev — Ioan Bogdan déclare que les travaux de B. P. Hasdeu constituent les fondements de l’historiographie moldave et que son propre travail à lui n’est qu’un addendum à l’œuvre du maître, sans, pour cela, — ajoute-t-il — être moins une rectijication de mainte conclusion de celui-ci. De même, s’appuyant sur les observations de Hasdeu — consignées dans le premier volume des « Cuvente den betrani » (Des paroles des temps anciens) — concernant les sources de la chronique de Manasses, Ioan Bogdan a approfondi ces questions, qu’il étudia pendant de longues annees à partir de 1889. Son ouvrage capital, La chronique de Manasess. Traduction médio-bulgare. Texte et glossaire, paraîtra d’ailleurs après sa mort, en 1922. En 1902, Ioan Bogdan, après plusieurs années d’étude, à l’occasion de la parution de la première édition de ses Documents et regestes concernant les relations de la Valachie avec la ville de Braçov et avec la Hongrie au XV-ème et XVl-ème siècles, dont une nouvelle édition, revue et améliorée, paraîtra en 1905 —, Ioan Bogdan demanda à Hasdeu son opinion sur cette entreprise, considérant celui-ci comme l’unique autorité, qui, dans les milieux scientifiques roumains, fût à même d’en apprécier la valeur réelle. En même temps il demanda à Hasdeu certains éclaircissements qui lui étaient nécessaires pour un autre ouvrage qu’il se proposait d’entreprendre à propos des « knez », travail qu’il va publier effectivement un an plus tard, en 1903. (cf. l’annexe VI). Dans l’introduction aux Documente..., Ioan Bogdan attire l’attention sur les mérités de Hasdeu en fait d’édition de documents slavons et afirme que c’est un devoir que de reprendre l’œuvre inaugurée avec éclat par celui-ci. S’assumant lui-même cette responsabilité, Ioan Bogdan publia en 1913 deux volumes de documents slavons de l’époque de Çtefan cel Mare (Etienne le Grand), en y appliquant la même méthode complexe que son érudit devancier, ajoutant aux textes de riches notes et commentaires historiques et philologiques, des glossaires et des index de formes grammaticales roumaines des documents slavons — aspects qui jadis avaient justement préoccupé Hasdeu, dans Arhiva istoricâ a României (L’archive historique de la Roumanie) tome III, et dans Cuvente den betrani tome I. Les études publiées par Ioan Bogdan entre 1902—1908, concernant les anciennes institutions médiévales roumaines et surtout leur caractère autochtone, reprennent elles-aussi sous une forme plus approfondie certaines des préoccupations de Hasdeu, relevables dans Istoria criticâ a românilor (L’histoire critique des Roumains) tome I (1873), dans VEtymologicum Magnum Romaniae, tome IV, ainsi que dans Cuvente den betrani. Les ouvrages de Ioan Bogdan, L’origine du voiévodat chez les Roumains, Sur les « knez » roumains, Le document des Rinzean de 1484 et l’organisation de l’armée moldave au XVI-ème siècle ont crée, en ce sens, une véritable tradition pour les études ultérieures. Si B. P. Hasdeu a été, entre autres — étant donné le caractère encyclopédique de ses activités —, l'initiateur des études slaves, c'est Ioan Bogdan qui, en tant que disciple du grand savant, approfondissant le domaine des rapports roumano-slave et les questions de la culture roumaine ancienne, créant pour la slavistique roumaine un base propre et autonome, est — à la fin du XlX-ème siècle — le véritable fondateur de cette discipline en Roumanie.