Quoique disposant d’environ 40.000 hommes armés, ce dernier n’avait la possibilité ni de leur assurer la nourriture et les fourrages, ni de leur payer leurs soldes, ce qui le contraignit à violer ses promesses en levant des contributions extraordinaires sur l’habitants. C’est ainsi qu’à Sistovo, l’aïan Tiuprioglu, nommé par Pasvanoglu, a levé une contribution extraordinaire de 200 bourses, en réquisitionnant en même temps, les aliments qui se trouvaient en ville pour les envoyer à Vidin K La région était dévastée et la plupart des paysans avaient abandonnée leurs foyers, en se dispersant. Dans cette situation Pasvanoglu s’était retiré à Vidin avec ses meilleures troupes en s’enfermant dans la forteresse, tandis que les autres détachements, sous le commandement de ses hommes, continuaient à terroriser la région. Les troupes de la Porte chassèrent les rebelles de Bazargik, Varna, Sistovo, Sofia, Tàrnovo. Dans leur retraite, les détachements rebelles pillaient et incendiaient tout ce qu’il rencontraient devant eux. Selon les chiffres données par L. Kirico, Pasvanoglu disposait de 7.000 soldats à Nicopolis, de 4.000 à Plevna, de 3.000 à Selvi, de 6.000 sous les ordres de Kara Moustafa près de Belgrade et de petits détachements-garnisons à Gabrovo et en d’autres localités. Le chef des rebelles accordait une importance particulière à la possession de la ville de Nicopolis et faisait des efforts sérieux à cette fin. C’est pourquoi les combats autour de Nicopolis avaient duré presque trois mois avec de grandes pertes des deux côtés. Autour de Vidin s’étaient concentrées contre Pasvanoglu des forces importantes, surtout des troupes asiatiques « bien armées et comprenant une cavalerie bien équipée »2. C. Hangerli, le hospodar de Valachie, avait réussi à corrompre les commandants de la garnison d’Orsova et à déterminer ainsi leur ralliement à la Porte, ce qui avait rendu bien plus difficile l’approvisionnement de Vidin 3. Après la libération de la ville de Nicopolis par les troupes de la Porte et l’arrivée de Kapudan Pacha sur le théâtre des operations, le nombre des soldats qui assiégeaient Vidin s’était élevé à environ 100.000. La France chercha à exploiter en sa faveur l’anarchie des Balkans. L’expédition de Bonaparte en Egypte, en l’été de 1798, qui marquait la nouvelle orientation de la politique suivie par la grande bourgeoisie française à l’égard de l’Empire ottoman, a déterminé le Directoire à s’occuper attentivement des problèmes balkaniques. Avant même de manifester ouvertement ses tendances d’expansion, le gouvernement français s’était rendu compte des avantages qu’il pouvait obtenir du fait de la rébellion de Pasvanoglu. «Le Directoire — écrivait Talleyrand à Flûry — ne verrait pas sans satisfaction le succès de Pasvanoglu »4. En l’automne de l’année 1798, le Directoire avait projeté d’envoyer pour la seconde fois Deschorches comme ambassadeur extraordinaire en Turquie. L’aide-mémoire rédigé pour servir comme guide à Descorches, comprenait deux propositions à faire au gouvernement turc à savoir: a) la conclusion d’un traité d’alliance offensif et défensif, ce qui impliquait la 1 A.P.E.R., même fonds, dos. 236/1798, p. 13. 2 L. I. POPOV, op. cit., p. 29. 3 HURMUZAKI, XIX2, p. 9. 4 Ibidem, Suppl., Is, p. 492. 489