région de Maramureç, la femme de Siminic, après avoir préparé le déjeuner et allaité son nourrisson, se dirige en courant.-3- exactement comme la femme de Goïko de la variante serbe, publiée par Vuk Stefanovic Karadiic — vers ses belles-sœurs et les invite à l’accompagner pour porter leurs déjeuners aux maçons. Ce n’est qu’après leur refus qu’elle se rend toute seule au chantier. Les faits cités ci-dessus prouvent non seulement l’ancienneté des variantes du centre, du nord et de l’ouest de la Transylvanie, mais ils fournissent aussi une série de nouveaux éléments à la discussion des ressemblances existant entre les chants roumains et ceux du sud du Danube. Nous allons ajouter une seule observation aux faits précédents: dans les chants aroumains, l’épouse allaite et endort également son poupon avant de partir. Dans cette variante aussi les maçons construisent l’édifice par ordre de l’empereur. La connaissance intégrale des variantes du folklore d’un peuple augmente le nombre d’éléments communs par rapport aux chants des autres peuples, précise la situation de ces éléments et contribue largement à l’éclaircissement des problèmes discutés jusqu’à ce jour. Elle rend possible l’établissement de types régionaux et permet ensuite de reconstituer leur ordre chronologique. A part les éléments communs au folklore balkanique, le folklore roumain semble avoir remanié et transformé, à une époque bien réculée, certains motifs qui lui sont propres et qu’on rencontre aussi bien dans les variantes de Transylvanie que dans celles classiques. Parmi ceux-ci, le motif des obstacles opposés à l’épouse afin de l’empêcher d’arriver la première avec le déjeuner — en fait, des épreuves surmontées par l’amour et le dévouement de la femme du maître — et le motif des soins prodigués à l’enfant orphelin par les éléments de la nature et les bêtes de la forêt. Ce motif est particulièrement important dans les variantes transylvaines: il clôt ces variantes en faisant de l’enfant l’objet central de l’intérêt du chant. De cette façon le caractère lyrique du chant s’accentuè et le dénouement du drame devient rassérénant. Dans ces variantes, l’enfant, orphelin élevé par les éléments de la nature sera placé avec son berceau à l’angle des murs, sous la gouttière du toit ou aux faîtes des deux érables issus des nattes, des pieds ou des prunelles de l’épouse fidèle ; il sera bercé par le vent, baigné par la pluie, oint par la neige et allaité — de même que Siegfried — par les biches de la montagne. Ce tableau d’une grande beauté, dans lequel est décrite la participation de la nature au soulagement de la peine des parents est destiné à rendre moins pénible l’épisode de la mort de la mère. Le motif de l’emmurement progressif est associé dans certaines variantes transylvaines à des réactions symétriques des éléments de la nature figurés comme des transsubstanciations de la mère sacrifiée: Si-o zidit-o pînà-n brîu Ils l’ont murée jusqu’à la taille Çi-o ieçit un spic de grîu. Et un épi de blé a germé ; Çi-o zidit-o pînà-n tî|à, Ils l’ont inurée jusqu’aux seins Çi-o ieçit verde holditâ; Et un petit champ verdoyant a surgi; §i-o zidit-o pînà-n barbà Ils l’ont murée jusqu’au menton $i-o ieçit un spic de iarbà. 1 I. TALOÇ, ibidem, 26, 29. 440