que l’effectif des troupes qui assiégeaient Vidin devait être réduit et le Kapudan Pacha rappelé 1. Au cours de la séance du Grand Conseil d’Etat de l’Empire ottoman, ■convoqué pour examiner la situation, les ulémas, ayant à leur tête Es-seid Mehmed Ariz, le grand moufti, avaient demandé une amnistie totale pour les bandes de Pasvanoglu, ce dernier devant être promu pacha et toutes ses forces devant être concentrées contre les Français. Après les débats, parait-il très animés, on était arrivé à la conclusion qu’il ne fallait pas pactiser avec les rebelles, cela pouvant constituer un encouragement à la sédition. Le Conseil avait décidé la continuation de la campagne contre Pasvanoglu et en même temps la mobilisation de toutes les forces nécessaires pour repousser l’attaque de Bonaparte 2. La nouvelle de l’appareillage de la flotte française de Toulon a provoqué une vive agitation parmi les chefs ottomans qui assiégeaient Vidin. « Le Kapudan Pacha est extrêmement inquiet à cause des nouvelles qui lui parviennent sur l’approche des Français — communique l’agent de L. Kirico — et il se consulte continuellement avec Ali Pacha (de Janina) afin de trouver les moyens de prévenir tout événement fâcheux»3. Ali Pacha de Janina insistait pour qu’on lui permette de rentrer dans sa province, qui était directement menacée et le Kapudan Pacha, en faisant usage de son autorité, a pu à grand’peine le contraindre de rester jusqu’à la fin d’août. D’ailleurs Kiuciuk Husseim avait aussi l’intention de se rendre à Constantinople et de laisser au vali delà Roumélie le commandement de l’armée avec l’ordre « de maintenir autant que possible le blocus ». Dans ces conditions, le désastre de l’armée qui assiégeiat Vidin, dans le courant de l’automne de la même année, n’a surpris personne. L’Autriche aurait pu venir efficacement en aide à la Turquie, mais le cabinet de Vienne avait intérêt à maintenir l’anarchie dans les Balkans, la Porte étant ainsi obligée de concentrer ses forces en ce point. Les troubles des Balkans « facilitent beaucoup — écrivait Herbert Rathkeal — l’arrangement de nos nouvelles affaires des confins, de commerce, de navigation, toutes ou onéreuses, ou alarmantes pour l’Empire ottoman » 4. La pulvérisation de l’armée de presque 100.000 soldats, mobilisée avec tant d’efforts et de sacrifices, a porté un rude coup à la Porte. Aucune force n’aurait plus pu empêcher Pasvanoglu de se diriger vers Constantinopole à la tête de ses hommes. Pourtant il n’a pas osé faire ce pas et l’une des causes qui l’ont retenu, sinon la plus importante, fut la conclusion de l’alliance entre la Porte et la Russie. Au cours des négociations russo-turques, la Russie avait offert à la Porte l’aide militaire pour réprimer la rébellion de Pasvanoglu. En Moldavie le bruit courait qu’à ses frontières se concentrait un corps d’armée russe, qui devait traverser les Principautés Roumaines pour combattre Pasvanoglu et 1 L. I. POPOV, op. cit., p. 32. 2 Ruffin-Talleyrand, août 1798; L. I. Popov, op. cit., p. 141, 142. 3 A.P.E.R., même fonds, dos. 236/1798, p. 122—125. 4 Herbert Rathkeal-Thugut, 24 février 1798; L. I. Popov, op. cit., p. 27 (en français dans le texte). 491