58 LA QUESTION d’extbème-ohient mais tout puissant, qu’obéissent — involontairement parfois — les souverains de l'Asie orientale en se groupant autour de la Chine, comme des enfants autour de leur mère, cherchant un appui moral et une communion intellectuelle, sans toutefois que le secours matériel s'ensuive nécessairement. Ainsi le grand empire remplirait un devoir de tutelle désintéressée vis-à-vis des petits empires, qu’il défendrait contre les entreprises du dehors, sans en retirer d’avantages pour lui-même. C'est à cette conception élevée que répondrait l'investiture conférée aux rois voisins, sans stipulations compensatrices. C’est un idéal fort beau lorsque les Empereurs de Péking étaient vertueux ou occupes de leurs affaires particulières ; mais, dans l’histoire, il dégénère souvent en des réalités fâcheuses, lorsque sa conception se dégrada parmi les visées personnelles d’autocrates ambitieux. A ce même sentiment de la solidarité obéirent les petits Etats, les confédérations plus ou moins changeantes, les associations régionales sans valeur et sans personnalités bien définies, qui se réunirent autour de l'Annam, comme l'Annam et la Birmanie se réunissaient autourde la Chine. Toutefois, à mesure que les Etats, clients moraux, devenaient moindres, la préoccupation du secours matériel entrait davantage en l'esprit de leurs chefs; et à mesure que cette demande de protection physique indiquait mieux leur faiblesse intérieure, le caractère de la tutelle d’un Etat sur l'autre se précisait plus exactement, et les motifs de l'Etat protecteur perdaient de leur pureté et de leur désintéressement primordiaux, pour faire place à des ambitions territoriales, et même à un but d'assimilation entière et de conquête. Nous verrons donc l'Annam absorber