LA POLITIQUE DE L’ANNAM AUTONOME 63 bas et remplacé la race royale, s’érigent eux-mêmes en dynasties, et sont les premiers à relâcher, par intérêt et orgueil personnel, les liens dont ils avaient contribué à contraindre le peuple conquis; et bientôt l'ambassade et le tribut annuels à Péking sontles seules marques de la vassalité de ces vice-rois à peu près indépendants. 11 n’est pas néanmoins douteux que le pays ne soit profondément acquis, et de force, à la prépondérance chinoise ; il n’est plus de royaume d'Annam, il n’est que des provinces annamites ; le peuple a perdu ses libertés, ses rois, ses privilèges de castes et jusqu’à son écriture ; et c’est de cette époque que date le croisement physique, intellectuel et moral des Chinois avec le peuple annamite, jusqu’alors autochtone. Nous voyons aussi que cette prépondérance n'est pas facilement supportée : à défaut d’un patriotisme particulariste, il demeure à l’Annam le sentiment de la race opprimée et de la liberté perdue ; et de violents soubresauts pour la reconquérir ensanglantent l’histoire des premières dynasties. De ces révoltes, l'une enfin devait réussir ; et, sortant enfin d’un esclavage, si étroit qu’il menaçait sa personnalité tout entière, nous allons voir l'Annam monter lentement et par échelons, de la vassalité la plus stricte jusqu’à l’indépendance presque entière, à travers les difficultés et les guerres d’une période orageuse. * * * En 546, l’Annam entier se révolte ; sous l’impulsion du chef de la famille Ly et du général indigène Trien, les troupes se soulevèrent et chassèrent les Chinois. Après des dissensions entre les vainqueurs, le trône demeure a Ly