LA POLITIQUE DE L’ANNAM AUTONOME 83 ses ennemis à la fois (tant la conception du Protectorat était parfois bizarre chez ces peuples), la conduite fut bien différente, et conforme néanmoins au génie propre des deux nations. Tandis que, procédant par coups de force et par surprises, le Siam inaugurait vis-à-vis du Cambodge cette politique de violence, d’astuce et de duperie qu'il continue aujourd'hui encore contre le Protecteur actuel de ce royaume, l’Annam procédait, en dehors de toute discussion, à l'infiltration lente, continue et invincible de la race cambodgienne par la race annamite, et, dans la paix la plus profonde, poussait sur le territoire voisin des colonies nombreuses et compactes. La différence entre ces deux manières d'influences est flagrante, et leur résultat n’est pas douteux. L’Annam s'en aperçut bien vite. Dans la période qui précède, le Protectorat était affaire d’amour-propre et d'ambition ; et le roi protégé — ou traité en ami secondaire — trouvait d;tns ses sujets des alliés enthousiastes pour secouer des lirns inutiles et offensants ; dans la période actuelle, les Annamites émigrants peuplent l'État voisin ; lors donc que le roid'Annam propose ou impose son Protectorat, il semble récupérer une partie de ses sujets, et ceux-ci semblent reprendre leur nationalité primitive ; si donc les désirs secrets du roi protégé le poussent toujours vers l'indépendance! les aspirations du peuple qu’il gouverne — et qui n'est plus absolument son peuple — tendent au maintien du Protectorat, et même à une assimilation plus complète avec le' Protecteur. C’est en vertu de ce simple principe que le» nations prolifiques font les conquêtes les plus faciles et les! plus durables. Les premières colonies que l’Annam envoya au Cam-