216 LA QUESTION D'EXTRÊME-ORIENT bler à Guillaume II la récompense naturelle de notre silence en un tel moment. Mais, dans cette hypothèse, la seule plausible qui nous reste, les bonnes dispositions de l'empereur allemand à notre endroit ne seraient pas choses négligeables. Et une entente, conclue depuis quelque temps déjà en Extrême-Orient, et ayant produit quelques résultats, pourrait devenir un garant important d'une autre entente, plus importante, sur des questions plus délicates et vitales. Mais il n’est pas du tout nécessaire — et l’histoire des puissances colonisatrices le démontre surabondamment — que les accords diplomatiques s’étendent au-delà des objets spéciaux en vue desquels ils ont été conclus. Et l'entente avec l’Allemagne dans la question d’Extrême-Orient peut et doit demeurer locale, et laisser à notre politique métropolitaine son indépendance et les espoirs qui lui sont chers. L’Angleterre, sur mer et dans les colonies, et spécialement en Chine, nous est une rivale autrement tenace et dangereuse que l’Allemagne sur le Rhin et dans les Vosges. Et l'alliance russe, qui nous protège immédiatement en Europe, nous est d'un secours insuffisant, quoique évident, en Asie. Il importe de la renforcer, et on n’y voit pas d’autre moyen que celui plus haut proposé. Ne serons-nous donc pas assez raisonnables un jour pour reconnaître que, avec les tempéraments qu’on y mettra, cette entente servira tous nos intérêts, et ne blessera même pas notre amour-propre ? En tout cas, il faut habituer la France à ce projet, et à l'espoir qu’elle arrivera à le réaliser de plein gré et en toute liberté, avant que les circonstances