166 l’annexion de la BOSNIE-HERZÉGOVINE sont enfermés dans la forteresse d’Arad : que l’Autriche prenne garde qu’il ne surgisse parmi eux un Silvio Pellico! Le journal serbe de Mostar, le Peuple, a cessé de paraître ; ses derniers -numéros ne contenaient plus que le titre et les annonces, la police ayant supprimé les articles. Enfin le fameux procès du complot pan-serbe, qui vas’ouvrir àAgram, est truqué d’avance, tout le scénario a été imaginé par un agent provocateur, nommé Nastitch, le même qui a machiné le procès de Cettigne; des accusés serbes ont tenté de se laisser mourir de faim parce que, depuis plusieurs mois, ils étaient détenus sans avoir été ni jugés ni interrogés. Un pareil régime ne semble pas de nature à concilier à l’Autriche les sympathies de ses nouveaux sujets. Les gouvernements de Vienne et de Budapest feignent d’ignorer la nationalité serbe ; en réalité, c’est parce qu’ils connaissent les progrès du sentiment national parmi les Serbes, qu’ils se sont décidés à la mesure brutale de l’annexion. Le peuple serbe est divisé en deux grandes masses presque égales comptant chacune environ 3 millions et demi d’âmes ; l’une est en Autriche-Hongrie, l’autre constitue le royaume de Serbie et le Monténégro. Selon queles 1.700.000 Slaves de la Bosnie-Herzégovine s’adjoindraient à l’un ou àl’autredeces deux groupes, la masse principale de la nationalité passerait d’un côté ou de l’autre : c’est ce que le Cabinet de Vienne a parfaitement compris; en réalisant l’annexion d’un territoire aussi grand que la Serbie et le Monténégro réunis (57.000 kilom. carrés), il a placé dans l'empire austro-hongrois le centre de gravité de la nationalité serbe. Dès lors, l’union panserbe ne peut plus s’opérer que dans l’intérieur de la monarchie et sous ses auspices ; l’autre fraction de la nation, si elle ne veut pas rester éternellement disloquée, n’a pluS qu’à se jeter dans les bras de l’Autriche et à implorer son admission dans l’Empire, ou bien à se ruer sur lui,