UNE CONFÉDÉRATION BALKANIQUE EST-ELLE POSSIBLE? 473 Kurdes, ses Arabes nomades, avec son Hedjaz et son Yémen, avec sa Tripolitaine? Verra-t-on la Bulgarie ou la Grèce engagées, par leur alliance, dans une querelle avec la Perse? Le Monténégro, attaqué par l’Autriche, pourra-t-il faire appel au concours des redifs dAnatolie? Il est impossible d’imaginer un moyen de séparer l’Empire Ottoman en deux parties dont l’une seulement serait engagée dans la politique européenne. On ne voit guère non plus comment il serait possible, sans risquer de rendre l’alliance illusoire, de distinguer entre les différents casus fœderis qui pourraient se produire. Autre difficulté, également grave. La Turquie entrera-t-elle dans la confédération, ou dans l’alliance, telle qu’elle est, sur la base de Vuti possidetis, ou assurera-t-elle certaines conditions spéciales aux nationalités non turques qui vivent dans la Turquie d’Europe, sans parler de celle d’Asie? Tous les plans de confédération balkanique ou orientale dont nous avons rappelé l’histoire font une place à l’Albanie et à la Macédoine. Il ne saurait être question actuellement de les séparer de la Turquie; mais la Bulgarie, par exemple, consentirait-elle à entrer dans une alliance avec la Turquie, si celle-ci ne donnait pas des garanties aux Bulgares de Macédoine ? Ceci revient à dire que la possibilité d’une union balkanique générale est étroitement liée à l’avenir de la Jeune-Turquie. Si elle adopte une méthode de centralisation et d’unification sans tempéraments, si son patriotisme légitime s’exagère en un nationalisme intransigeant, non seulement elle ne réussira pas à gagner le cœur des populations chrétiennes de la Turquie d’Europe, mais elle alarmera les États voisins, elle les mettra pour longtemps en défiance ; elle finira par susciter contre elle la confédération ou l’alliance qu’une politique plus souple pourrait constituer à son avantage.