18 INTRODUCTION articles allemands, prélude de l’invasion des casques à pointe. L’année 1897 est particulièrement brillante pour le commerce allemand ; les consuls anglais redoublent leurs avertissements ; l’un d’eux écrit d’Allemagne : « Tout marque l’énorme progrès économique accompli par l’Allemagne durant ces vingt-cinq années ; tout traduit au dehors le gigantesque effort de ce pays pour arriver à la tête du mouvement industriel et évincer tous ses rivaux 1 ». La lutte des deux peuples, vers cette époque, est devenue, de part et d’autre, pleinement consciente; c’est l’Allemand que tout bon Anglais regarde maintenant comme son ennemi, c’est lui qui menace sa fortune et sa vie; les discours de M. Joseph Chamberlain, sa campagne en faveur d’une union douanière de l’Angleterre avec ses colonies, ses exagérations de politicien, font pénétrer dans tout le Royaume-Uni l’idée d’un péril germanique imminent. En Allemagne, les harangues de l’Empereur, la propagande de la Ligue navale, familiarisent le public avec l’idée de l’expansion maritime et l’habituent à considérer ¡’Anglais comme le seul adversaire qui lui reste à abattre pour exercer l’hégémonie matérielle et morale du monde civilisé. De commerciale qu’elle était, la rivalité devient nationale ; elle dégénère en une hostilité générale, en une défiance universelle qui dénature jusqu’aux intentions conciliatrices des souverains et des hommes d’État. Chacun des deux peuples se jette dans la lutte avec son tempérament : ¡’Anglais froidement passionné, avec des crises d’angoisse collective où l’agitation et ¡’inquiétude générales gagnent jusqu’au gouvernement, et, dans la pratique, tenace, persévérant, mais opportuniste, prompt, quand il en sent la nécessité, à jeter du ¡est et à sacrifier des intérêts secondaires pour 1. Cf. Victor Bérard : VAngleterre et VImpérialisme. Arm. Colin, 1900, 1 vol. in-18 jésus; page 87.