104 LE PRÉSENT ET l’aVENIR Chambre sont en conflit pour de mesquines questions de forme. En somme il n’existe que l’apparence d’un gou-vernement constitutionnel. En fait, le mot d’ordre du Comité décide de tout. Les pouvoirs collectifs et occultes cachent toujours de profondes dissensions intestines et d’âpres rivalités de personnes. Des hommes, sortis du Comité Union et Progrès, et, si l’on nous passe l’expression, lancés par lui, comme Djavid bey et Talaat bey, ne pouvant ou n’osant s’en affranchir, ont cherché à le conduire, à l’inspirer et, par lui, à diriger l’opinion publique. A plusieurs reprises, le Comité central a regimbé et a voulu sortir du rôle secondaire auquel on cherche à le réduire, mais il manque d’hommes de valeur et surtout d’hommes politiques. Les plus intelligents, comme le docteur Nazim bey, sont les plus utopistes. La rivalité de l’élément civil et de l’élément militaire est une autre source de discorde. Mahmoud-Chefket pacha, vainqueur de la contre-révolution du 13 avril 1909, chef incontesté de l’armée dont il est très aimé, ne désire pas assumer lui-méme le pouvoir; mais rien ne peut se faire contre son gré, et son veto est sans réplique. Bon militaire, mais sans grandes vues politiques, Mahmoud-Chefket ne s’intéresse qu’à la réorganisation de l’armée ; dans ce domaine, il n’admet aucune ingérence, pas même celle du ministre des Finances. On n’a pas oublié à ce sujet ses dissentiments avec Djavid. Entre ces deux hommes grandit une sourde rivalité qui se prolonge en un antagonisme général entre l’élément civil et l’élément militaire. La circulaire de Mahmoud-Chefket, qui interdit aux officiers de faire partie d’une société ayant un but politique, n’a eu pour résultat que de poser en face les uns des autres comme des rivaux, parfois comme des adversaires, les clubs Union et Progrès et les clubs militaires. Mahmoud est trop puissant pour être combattu ouvertement, à plus forte raison pour être mis à