226 LA POLITIQUE EUROPÉENNE glisser le levier aux jointures de l’alliance franco-russe et de la Triple-Entente et, en exerçant une pesée au moment opportun, à les disloquer. L’Alliance franco-russe rompue ou relâchée, la France resterait seule avec l’Angleterre, son armée serait isolée en face des masses allemandes : les puissances occidentales, qualifiées de « révolutionnaires », demeureraient seules en face de l’alliance restaurée des trois empereurs. En mêlant la séduction à l’intimidation, la diplomatie allemande cherche à détacher la Russie. Les démarches pacifiques faites par le Cabinet de Paris pour aider son allié à sortir sans guerre de la situation difficile où il s’enfonçait, dénaturées par les agents allemands, sont représentées à Pétersbourg comme un manquement à nos devoirs d’alliés. La presse allemande, se servant adroitement des exagérations de la notre, amplifie les moindres incidents et dépeint la France comme le foyer de toutes les révolutions. A Berlin et à Vienne on multiplie les efforts pour faire oublier au Tsar et à ses ministres la pression menaçante exercée sur eux. Dès^ le lendemain du jour où M. Isvolski céda aux représentations du comte dePourtalès, la Gazette de VAllemagne du Nord et le Fremdenblatt publiaient des notes, inspirées par la Wilhelmstrasse et le Ballplatz, où ils se donnaient beaucoup de mal pour expliquer que jamais lAllemagne n’avait exercé la moindre pression à Pétersbourg, encore moins formulé des menaces, et qu’elle n’avait agi que dans l’intérêt de la Russie; il fallait donc se garder de croire aux inventions des journaux malveillants. Le chancelier s’exprimait dans le même sens dans son discours du 29 mars au Reichs-tag1. La même tactique continue : caresses et intimida' tion. On a été jusqu’à lancer la fantaisiste nouvelle de négociations en vue d’une alliance entre l’Autriche- 1. Tardieu, ouv. cité, p. 208.