ET L’ANNEXION DE LA BOSNIE-HERZÉGOVINE 223 demi, et lui envoyèrent « l’expression chaleureuse de leur inaltérable amitié. » Le Roi répondit à ses alliés et amis en les assurant que leur amitié lui était bien chère, et qu’elle trouvait dans ses sentiments « une sincère et pleine réciprocité. » Plus significative que le lyrisme de ce renouveau d’amitiés augustes et, pour l’avenir, plus importante, a été la décision du gouvernement austro-hongrois de commander cinq grands cuirassés du type Dreadnought. En 1913, cette puissante escadre, capable de se mesurer avec la flotte anglaise de Malte, notre escadre de Toulon ou la marine italienne, fera son apparition dans la Méditerranée : elle y modifiera l’équilibre des forces. Cette résolution, qui engage une si grosse dépense, prise quelques jours après la fin de la crise, en précise le sens et en souligne le résultat. Elle est de nature à faire craindre que, loin de clore l’ère des complications, la crise de 1908-1909 n’en soit que le prélude; elle signifie que, dans les mers qui entourent la péninsule balkanique, l’Autriche-Hongrie est décidée à faire figure de puissance maritime, à ne céder à personne l’empire de l’Adriatique et à revendiquer, dans tous les événements de l’Orient méditerranéen, un rôle de premier plan. Le prince Louis de Bavière, dans une allocution, a célébré comme un progrès du germanisme cet accroissement prochain des forces offensives do l’Autriche-Hongrie; les journaux allemands ont aligné les futurs cuirassés, à côté de ceux de l’Empire, en face de la flotte britannique, tandis que la presse anglaise constatait avec humeur la difficulté croissante de maintenir le principe du two powsrs standard. Ainsi viennent se classer les incidents particuliers de la vie politique dans l’ensemble des grands faits et des évolutions générales : vue de très haut, la crise de Bosnie apparaît comme un épisode de ^ rivalité anglo-allemande ; c’est du moins l’un de ses aspects.