284 UNE FORME NOUVELLE DES LUTTES INTERNATIONALES les effets du boycottage commencèrent à se faire sentir; à la fin d’octobre, l’Association austro-hongroise d’exportation reçut un rapport inquiétant, et bientôt, de Trieste, de Fiume, de Budapest, des villes industrielles de Bohême, des plaintes s’élevèrent. Le commerce aus-tro-liongrois, dont le principal débouché est dans les ports du Levant, était comme frappé de paralysie. Trieste surtout souffrait ; les bateaux du Lloyd reve-nai ?nt au port sans avoir pu débarquer un ballot et, au retour, les exportateurs refusaient de reprendre leurs chargements. Déjà, au 10 décembre, 26 vapeurs chargés de marchandises autrichiennes étaient revenus sans avoir opéré leur déchargement; toute l’exportation de l’Empire ottoman, très active à l’automne, échappait aux bateaux autrichiens et hongrois ; le trafic du Lloyd se chiffrait par 450.000 couronnes de moins, pour le mois d’octobre 1908, que pour le mois correspondant de 1907. La Compagnie des chemins de fer du Sud accusait, pour novembre, une diminution de recettes de 1.232.513 couronnes; on prévoyait, sur la place de Trieste, des désastres financiers et commerciaux. Une réunion de négociants, tenue à Vienne, rendant le gouvernement responsable de ce « cas de force majeure », lui demandait d’indemniser les pertes du commerce et de l’industrie. On était loin de l’abnégation patriotique des premiers jours ! La Chambre de commerce de Budapest insistait pour une prompte entente avec le gouvernement ottoman ou pour des mesures de répression. Les plaintes devenaient d’autant plus vives que le boycottage coïncidait avec une dépression économique générale : les tisseurs de coton d’Autriche et de Bohême, les imprimeurs sur étoffes, décidaient, dans une réunion, de restreindre de 15 pour 100 leur production ; la fabrique de fez de Strakonice (Bohême) perdait toute sa clientèle turque et égyptienne ; les sucreries et les raffineries de pétrole voyaient leur exportation s’arrêter brusque-