24 INTRODUCTION persistance incoercible des sentiments nationaux dans certaines parties de l’Empire, ont commencé de faire dans le colossal édifice dressé par la rude main de Bismarck, mais l’œuvre des ancêtres est intangible. L’Angleterre, sans frontières de terre, a des intérêts très simples et très clairs; l’Allemagne, enfoncée à coups de cognée au milieu de l’Europe, gênée dans ses mouvements par les blessures qu’elle a faites au cœur de ses voisins, engagée par ses émigrants, par son commerce et sa navigation dans la politique mondiale, a des intérêts multiples et contradictoires ; il lui faut, à la fois, pour faire aboutir les desseins opposés et simultanés que lui imposent son histoire et ses intérêts présents, suivre la tradition prussienne d’entente avec l’Angleterre et, en même temps, prendre, aux dépens de cette même Angleterre, sa place dans le monde des affaires et du commerce ; rechercher l’amitié française et maintenir intégralement les résultats acquis en 1870 ; regagner la contiance russe et continuer sa politique d’intluence et d’expansion dans l’Empire ottoman ; concilier ses prévenances envers le Saint-Siège avec sa situation d’Em-pire luthérien et une politique panislamique ; satisfaire à la fois les hobereaux prussiens, agriculteurs et conservateurs, de l’Est et les industriels libéraux de FOuest. Toutes ces antinomies se reflètent dans l’esprit large et ouvert de Guillaume II, mais elles ne s’y résolvent pas. Son intelligence, toujours en mouvement, toujours inquiète, est sollicitée en sens contraire vers des objets qui la séduisent tour à tour et qui l’attirent sans pouvoir la retenir. Tant qu’il prépare un projet, il n’en aperçoit, dirait-on, que les avantages ; mais à peine l’a-t-il exécuté, qu’il n’en distingue plus que les inconvénients. De là certaines incohérences apparentes dans la conduite de ses desseins, certaines hésitations entre les diverses avenues qui s’offrent à son activité. Il fait mettre en chantier de nouveaux cui-