LA QUESTION ALBANAISE 345 conséquence inévitable d’amener l’intervention d’une puissance étrangère. L’Albanie a donc intérêt à lier ses destinées à celles de l’Empire ottoman. Il faut qu’une génération s’écoule, formée par l’école et la civilisation nouvelle; l’Albanie pourra alors, suivant l’alternative qui se présentera, prendre une large part à la vie de la Turquie régénérée et organisée en un grand État fédéral, ou vivre de sa vie propre. Ces idées, dont l’avenir reconnaîtra la justesse, ont, pour le moment, séparé Prink Pacha de ses Mirdites. Une partie d’entre eux, dociles à sa voix, n’ont pas pris les armes; mais ceux qui, sourds à ses avis, sont entrés en lutte contre les Turcs, ne lui pardonnent pas ce qu’ils appellent sa trahison. Actuellement, le fils de Bib-Doda ne pourrait pas sans danger parcourir la montagne qui, en 1908, illuminait ses sommets un l’honneur du retour de son prince. La campagne de mai et juin 1911 a été rude, plus rude que les Turcs ne l’ont avoué. Scutari vit arriver par le lac de nombreuses londra1 chargées de morts et de mourants; les blessés, manquant de tout, périssaient en grand nombre. Cette dangereuse et pénible conquête des repaires inaccessibles des Malissores n’était pas encore achevée que le soulèvement des Mirdites allait rendre nécessaire une campagne plus rude encore. C’est au moment où l’armée et les Jeunes-Turcs commençaient à se lasser d’une campagne si coûteuse en hommes et en argent et qui n’avait guère d’autre résultat que de ruiner un pays déjà si pauvre, que se produisit l’intervention de l’Autriche. Un article du Frern-denblatt-, journal du ministère des Affaires étrangères de Vienne, daté du 7 juin, exprimait, en termes très °ets et très catégoriques, le désir du gouvernement 1 Longues barques à bec relevé en usage sur le lac de Scutari. 2- Voir le texte traduit dans les Questions diplomatiques et coloniales ûu 16 iui