206 LA POLITIQUE EUROPÉENNE conférence internationale n’est pas un parlement; le vote de la majorité n’oblige pas la minorité, et il suffît d’une seule opposition pour faire crouler les plus habiles combinaisons. Pour discuter, il faut être d'accord, dit un vieil adage qui s’applique à merveille aux conférences internationales. Les décisions n’y peuvent être prises qu’à l’unanimité des voix et, pour l’obtenir, un accord préalable est nécessaire, à moins que l’un des opinants ne représente une force telle que les oppositions se taisent et subissent sa loi. Bismarck tint ce rôle au Congrès de Berlin. A Algésiras, il n’y eut qu’un vote important, et ce fut sur une simple question d’ordre du jour : mais cela suffit pour mesurer le nombre et la force des deux partis; il n’y eut de votes sur les questions de fond qu’après qu’on fut assuré, par les longues et difficiles négociations dont M. André Tardieu s’est fait l’historien, d’avoir trouvé des formules qui réuniraient toutes les voix. L’Autriche, dans la crise de 1908-1909, déclara qu’elle n’irait à une conférence que si le fait de l’annexion de la Bosnie n’y était pas mis en discussion et si le programme était fixé d’avance sans qu’il pût y être rien ajouté au cours des délibérations. Il était évident dès lors que la conférence ne se réunirait pas ou que, si elle se réunissait, ce ne pourrait être que pour enregistrer, après des débats de pure forme, le fait accompli et le droit violé. Si la conférence s’était réunie, les petits États n’y auraient pas été admis; tout se serait passé entre les sept grandes puissances signataires du traité de Berlin, et l’on aurait vu, une fois de plus, les grands États disposer des plus petits sans consulter leurs vœux, ni les admettre à en délibérer. Il vaut mieux que les nations démocratiques n’aient pas donné ce spectacle et n’aient pas consacré, par un nouveau précédent, un droit si peu conforme à la justice. A Buchlau et à üesio, à Paris, à Londres et à Berlin,