UNE CONFÉDÉRATION BALKANIQUE EST-ELLE POSSIBLE? 4SI La mort du prince Michel, assassiné en juin 1868 par les partisans des Karageorgevitdh, arrêta l’exécution de ce plan, dont le moindre défaut était de partager la peau d’un ours qui a montré depuis, à Plevna, qu’il avait des griffes et des crocs. L’insurrection de Crète éclata en 1868, et les Grecs se plaignirent de ne trouver aucun appui parmi les Slaves de la péninsule. Entre Grecs, Serbes et Bulgares, la rivalité pour la Macédoine alla désormais s’envenimant. Entre Serbes et Monténégrins, on se dispute l’Herzégovine. Durant la crise de 1875-1879, chacun tire de son côté et fait sa politique particulière : les Grecs de Roumélie aident les Bachi-Bouzouks à massacrer les Bulgares insurgés; le prince Carol favorise le soulèvement bulgare, mais il ne croit pas l’heure venue de chasser les Turcs d’Europe; avec son grand bon sens politique, il est d’avis que les grandes puissances devraient laisser « les États vassaux de la Turquie et les provinces isolées jeter leur gourme. S’ils réussissent à sortir victorieux de la lutte avec leur suzerain, tant mieux! Sinon, ils ne méritent pas de devenir indépendants (1). » Le rôle qu’une confédération balkanique aurait pu jouer, ce fut Alexandre II qui le prit. Le résultat de la guerre de 1877-1878 et du Congrès de Berlin fut de mettre la Bosnie et ¡’Herzégovine dans la dépendance de l’Autriche et de mêler celle-ci plus étroitement aux affaires balkaniques : ainsi l’avait voulu Bismarck. Les petits États allaient passer pour longtemps au second plan, la volonté des peuples allait être étouffée et le mot d’Alexandre Ier : « Les convenances de l’Europe sont le droit », allait, une fois de plus, s’appliquer avec vérité à la politique orientale. La tentative conçue par le prince Michel et Garacha-nine n’en est pas moins intéressante; c’est la première etla seule fois qu’un projet de ce genre ait été sérieu- (1) De Witte, ouv. cité, p. 263.