88 LA. RÉVOLUTION TURQUE apparaissaient. Mais il est non moins certain que, par l’initiative des Jeunes-Turcs, le point de vue a, du jour au lendemain, changé cap pour cap. Les questions ne se posent plus aujourd’hui comme elles se posaient hier : les Turcs sont intervenus comme une cause efficiente dans leurs propres destinées. Ce mouvement qui change la face des choses dans l’Empire ottoman, l’Europe le regarde avec une sympathie réelle, d’abord parce que les intentions et les premiers actes des réformateurs méritent l’estime, parfois même l’admiration ; ensuite, et surtout, parce que les puissances ne s’engageaient qu’à contre-cœur, lentement et en sondant le terrain, dans ce labyrinthe des questions orientales où l’on sait bien comment on entre, mais d’où on ne sait ni quand ni comment on sortira. L’Europe est aujourd’hui résolument pacifique; elle ne voyait pas sans angoisse se préparer des complications dans cet Orient d’où sont sorties tant de guerres stériles. Devant les pièges redoutables de la question macédonienne, elle hésitait : si les Turcs lui offrent une issue, elle en profitera avec joie ; s’ils peuvent résoudre eux-mêmes la vieille question d’Orient, elle y applaudira de bon cœur. Nous ne serions pas surpris que telles aient été les réflexions qu’ont échangées les souverains de l’Europe dans les visites qu’ils se sont faites aufendemain delà révolution. C’est, en tout cas, ce que la Russie et l’Angleterre ont fait savoir aux cabinets européens. La Russie a ajouté qu’elle retirait provisoirement ses projets de réformes pour la Macédoine, se réservant de les représenter si les réformes entreprises par les Ottomans eux-mêmes venaient à échouer ou paraissaient insuffisantes. Rien de plus sage que cette expectative sympathique. La Russie est bien désabusée aujourd’hui de la politique balkanique ; il y a tout lieu de croire qu’elle ne cherchera pas à brouiller les cartes. Quant à l’Angleterre et à l’Allemagne, si elles avaient