296 LA QUESTION ALBANAISE de faits, d’ailleurs connexes, que se pose la question albanaise et qu’elle prend toute son importance. Pour tous les Etats balkaniques, la destinée future de l’Albanie est un problème capital : le sort de la Macédoine en dépend et, dans une large mesure, l’avenir des Turcs en Europe. Longtemps silencieuse et ignorée, l’Albanie entre aujourd’hui dans la politique européenne. Quelle place y tiendra-t-elle ? I Des plaines du Yardar à l’Adriatique, de la Thessalie au Monténégro, l’Albanais est maître par le droit du premier occupant et par le droit du plus fort. Par la race, par la langue, par les croyances, par les mœurs, il se distingue et se sépare des autres peuples de la péninsule ; il a son individualité bien tranchée. 11 confine vers le Sud aux Hellènes, vers Je Nord et vers l’Est aux Slaves, mais nulle part il ne se confond ni avec les uns, ni avec les autres ; il lui arrive d’assimiler, de gré ou de force, ses voisins, mais il ne se laisse pas assimiler par eux : il les méprise. Qu’il soit grand-vizir à Stamboul ou berger dans les solitudes du Pinde, le Skipetar — c’est ainsi que lui-même se nomme —■ est un aristocrate, un homme libre, un noble. Le Bulgare, dans les plaines delà Macédoine, se courbe sur son sillon et la* boure la terre du Turc; l’Albanais, lui, est le roi des montagnes ; chasseur, pasteur, soldat ou brigand, il dédaigne le travail assidu, obligatoire, qui fait de l’homme un esclave; il entend n’obéir qu’à ses coutumes et ne relever que de son fusil. Son rôle historique est en rapports étroits avec sa nature et sa nature avec celle de son pays.