362 LA RIVALITÉ DES GRANDES PUISSANCES noir de notre recul. Si notre position est menace'e, ce n’est point une raison pour la déserter, mais pour la défendre avec plus d’énergie. Sans doute le temps n’est plus où, pour naviguer et commercer dans les Echelles du Levant, il fallait arborer le pavillon de 1’ « empereur de France » ; mais sur le terrain de la libre concurrence économique et politique, nous sommes encore assez forts et assez riches pour batailler et garder notre place. Nous avons tenu à analyser avec précision les méthodes du peuple allemand dans son essor économique, car elles sont si bien adaptées à leurs fins qu’elles peuvent nous servir d’exemple ; mais leur succès ne doit pas nous faire perdre de vue les points faibles d’une si brillante expansion. La tactique d’offensive hardie que les banques allemandes pratiquent dans la lutte économique a ses inconvénients, surtout lorsque les capitaux sont rares : il suffit de rappeler la crise de 1900 et la déconfiture de la Leipzi-ger Bank, sans parler de la crise qui n’est pas encore terminée. En outre, la conquête des « territoires économiques » est toujours précaire lorsqu’il s’agit d’une terre étrangère où d’autres influences peuvent se faire jour. Actuellement l’amitié des deux souverains permet à l’Allemagne, en Turquie, des initiatives audacieuses qui, si les circonstances venaient a se modifier, n’auraient peut-être plus le même succès. Enfin, le chemin de fer de Bagdad, créé par les Allemands, profitera à toutes les puissances industrielles et commerçantes ; la résurrection de ces pays de Mésopotamie, dont la richesse a émerveillé l’antiquité, sera un bienfait pour les misérables populations qui y vivent et pour toute l’Europe civilisée. Prenons donc garde de nous laisser hypnotiser par le « péril allemand » que l’on nous représente par-