226 LA. QUESTION DE MACÉDOINE par chèques aux banques de Salonique. Les hommes partent seuls pour l’Amérique, laissant au pays femmes, vieillards et enfants ; tous reviennent après trois ans environ, rapportant une dizaine, quelquefois une vingtaine de mille francs d’économies. En 1907, pour la première fois, le nombre des revenants a été sensiblement égal à celui des partants. Sur la terre étrangère, ils restent étroitement groupés entre eux; ils s’américanisent très peu et, de retour au pays, redevenus paysans macédoniens, ils réalisent l’ambition de leur vie : acheter un tchiflik et devenir propriétaires. Il en est résulté, dans les cazas de Florina et de Iiastoria, une hausse extraordinaire du prix de la terre. Le bey turc, inquiet du lendemain, effrayé des troubles et des réformes, vend avec plaisir son domaine quand il en trouve un bon prix. Dans les villes, à Monastir notamment, le prix des maisons, des boutiques, augmente dans des proportions inouïes. On citait à Florina, à l’automne 1906, une bicoque qui venait d’être vendue 42.000 francs à un « Américain ; » on montrait, à Monastir, des boutiques louées jusqu’à 30 livres turques par an. Le prix des vivres hausse, et, par suite, la culture devient plus rémunératrice : il y a donc intérêt à bien cultiver et l’on commence à remplacer l’antique araire en bois, dont on se servait au temps d’Alexandre le Grand, par des charrues en fer; on achète des instruments agricoles. Les hommes valides étant partis pour les Amériques, ce sont les vieillards, les femmes et les enfants qui cultivent; la main-d’œuvre agricole est devenue si rare que les salaires se sont élevés de trois piastres par jour à dix et à vingt piastres. Partis outre-mer ou occupés aux travaux des champs devenus plus rémunérateurs, les hommes ne font plus partie desbandes et la pacifica-