DE LA QUESTION D’ORIENT 47 Tiflis, après avoir été à Londres et à Athènes » s’étendait au vilayet de Bitlis et à la région de Mouch. Les Turcs, dans la répression, commettaient les pires excès. L’Angleterre, par application de l’article 61 du traité de Berlin, demandait à ouvrir une enquête sur ces événements ; la France et la Russie joignaient leurs commissaires aux siens. La question ne sortait pas encore du domaine local pour entrer dans celui de la politique générale; mais voici qu’à la fin du mois d’août 1895, lord Sa-lisbury, qui venait de succéder au Foreign Office à lord Kimberley, prononçait à Douvres un grand discours où il prophétisait que la justice de l’histoire ne tarderait pas à amener la disparition de l’Empire turc. « Ne croyez pas, ajoutait-il, que j’aie l’intention de jouer le rôle de chirurgien... mais le danger n’en existe pas moins et continuera d’exister. Il y a un centre de corruption d’où la maladie et la décomposition peuvent gagner les parties saines de la communauté européenne. » Et il concluait : « le temps des efforts n’est pas passé, encore moins celui des préparatifs. » A plus de quarante ans de distance, c’étaient, presque mot pour mot, les paroles de Nicolas Pr à sir Hamilton Seymour, prélude de la guerre de Crimée ! Un tel langage, dans la bouche du Premier ministre conservateur, venant après la campagne menée par Gladstone, M. Asquith, les orateurs et les journaux libéraux, et après que le public anglais avait pu, durant tout l’été, « s’adonner à l’un de ses sports préférés, une croisade de philanthropie agressive qui sert les intérêts britanniques2, » était le 1. M. Meyrier, vice-consul à Diarbékir, à M. Hanotaux, 5 octobre 1894. Livre Jaune, n" 10. 2. L’expression est de M. Francis de Pressensé, article cité p. 681.