122 LA QUESTION DE MACÉDOINE civilisation byzantine a exercé une bienfaisante influence sur ces populations slaves, personne ne le nie; mais est-ce une raison, parce que la civilisation romaine a transformé la Gaule et la Grande-Bretagne, pour que les Italiens d’aujourd’hui prétendent régner sur la France et l’Angleterre? Si l’empire byzantin put survivre si longtemps, n’est-ce pas grâce à ces « barbares » slaves qui lui infusèrent un sang nouveau, et lui prêtèrent leurs bras et leur courage pour résister à l’invasion musulmane? Il ne s’agit pas, d’ailleurs, de savoir ce qu’a été, à travers les siècles, la Macédoine, mais ce que veulent être, aujourd’hui, les populations qui l’habitent. Mahomet II, après la conquête, reconnaît le patriarche orthodoxe grec comme le chef de tous les chrétiens de son empire d’Europe, confondus tous ensemble sous le nom de « roméis : » les Grecs se servent habilement de ce privilège pour helléniser, par la religion et par la langue, toutes les nationalités des Balkans et les englober dans les cadres de l’organisation du patriarcat œcuménique. A travers tous les temps modernes se poursuit une lutte obscure, acharnée, dont les haines d’aujourd’hui sont le dernier écho. Les Bulgares subissent à la fois l’oppression politique et sociale des Turcs, qui les réduisent à une condition voisine du servage, et l’oppression religieuse et intellectuelle des Grecs, plus dangereuse encore pour l’avenir de leur nationalité, puisqu’elle tend à ôter aux Slaves l’espérance même d’une résurrection. Au xvme siècle, la conquête entreprise par le patriarcat au nom de l’hellénisme semble achevée; pour les étrangers, le Phanar apparaît comme le seul centre de vie chrétienne qui subsiste dans l’empire ottoman. En 1766, le patriarche grec supprime l’archevêché serbe d’Ipek ; et, en 1767, le siège métropo-