268 LA CRISE DE 1908 mercial ne s’établira pas, par la voie nouvelle, entre l’Autriche et le port de Salonique. Les marchandises venues de l’Ouest auront toujours intérêt à s’embarquer à Yenise ou à Trieste. Quant aux marchandises allemandes, qui ont tant de facilités pour gagner Hambourg, Rotterdam ou Anvers, elles ne traverseront pas toute l’Europe centrale pour venir chercher un bateau à Salonique. On sait que, dès que le chargement sur un navire est nécessaire, la longueur du trajet par eau est relativement de peu d’importance et accroît peu les frais. 11 est donc improbable que la future ligne, surtout tant qu’elle restera à voie étroite, devienne une grande voie de trafic international ; elle fera plutôt, pour emprunter une comparaison à la marine, un commerce de cabotage qu’un grand commerce international. Le baron d’Æhrenthal, surpris du vif mécontentement suscité en Russie par son discours du 27 janvier, s’est appliqué à démontrer que la politique de l’Autriche-Hongrie n’est qu’unepolitique économique. Son affirmation est justifiée puisque l’ouverture de nouvelles voies de communication est d’abord une entreprise d’ordre économique. Il n’en est pas moins vrai que la ligne qui va joindre la Bosnie avec Mi-trovitza a un autre sens et une autre portée. On a très heureusement appelé « politique des chemins de fer » une méthode qui, par la suprématie économique, conduit à l’hégémonie politique ; les chemins de fer sont l’outil par excellence de l’impérialisme; la plupart des grands problèmes internationaux que l’expansion européenne a soulevés dans le monde, se concrétisent sous la forme d’une question de chemins de fer1. Le Serajevo-Mitrovitza est un 4. Le Fremdenblatt, de Vienne, qui passe pour recevoir les inspirations du Ballplatz, écrivait à la fin de septembre 1877, c’est-