DE LA QUESTION D’ORIENT 39 par la Russie, s’était jeté dans les bras de ses rivaux; il y trouvait, en même temps, une occasion de renouer avec la Turquie des relations plus cordiales. « Le respect des droits de S. M. I. le Sultan », l’intégrité de ses États, tout ce qui faisait, de 1873 à 1878, le leit-motiv de la diplomatie anglaise, c’est, en 188S, la diplomatie russe qui s’en empare et qui en joue. Et, par un amusant chassé-croisé, « améliorer le sort des populations, examiner leurs griefs, consulter les vœux des populations », toutes les formules dont la diplomatie russe avait usé avant la guerre de 1877, c’est sur les lèvres et sous la plume des représentants de la Grande-Bretagne qu’il les faut chercher *. A la Conférence des ambassadeurs à Constantinople, sir W. White va jusqu’à demander que l’on parle le moins possible du traité de Berlin : « il craindrait que l’expression : dans les limites du traité de Berlin, ne fût pas comprise ou plutôt qu’elle fût comprise dans un sens restrictif par les populations dont il s’agit d’améliorer le sort2. » Le représentant de la puissance qui avait signé le traité de San Stefano avait beau jeu pour rappeler, devant l’envoyé britannique, un passé encore récent. M. de Nélidof, avec le tact et la finesse d’un diplomate consommé, sut donner à son pays cette revanche académique3. î. Livre Jaune de 1883-86, p. 233. 2. Protocole du 23 novembre. — Livre Jaune, p. 273. 3. Ibid, p. 273 : « Nous avons; dans notre deuxième séance, posé les bases de nos délibérations en reconnaissant que leur objet était le rétablissement de l’ordre conformément aux stipulations du traité de Berlin. Nous étions autorisés à penser que, du moins, ce principe était accepté par tous : à un point de vue plus général, le maintien du traité de Berlin était en accord avec les termes du Protocole signé à Londres le 17 janvier 1871, Protocole qui établit, « comme un principe essentiel du droit des gens, qu’aucune puissance ne peut se délier des engagements d’un traité, ni en modifier