LES NATIONALITÉS 125 rait pas manqué de prendre sur les Slaves un ascendant et une influence dont l’occasion perdue ne se retrouvera jamais plus. Les Grecs, aujourd’hui, s’étonnent et s’irritent des revendications slaves. Ne devraient-ils pas plutôt s’émerveiller qu’après avoir, durant des siècles, disposé seuls des forces qui pétrissent l’âme des peuples : — l’église, l’école, la richesse, —• après avoir tout fait pour étouffer le sentiment national chez les Bulgares, ils n’aient pu les empêcher de se retrouver intacts, plus vivaces que jamais, avec leur langue, leurs traditions, leur nationalité? Le piteux résultat de la tactique des Grecs n’est-il pas la meilleure preuve de l’inanité de leurs prétentions et de la vitalité indestructible de ces Slaves qu’ils s’obstinent à traiter en« barbares? » Après la guerre de 1878, le premier exarque bulgare ayant été interné en Asie Mineure, son siège échut au prélat éminent qui l’occupe aujourd’hui, Mgr Joseph. Il sortait alors des écoles de Paris, il était jeune, actif, passionnément dévoué à la cause nationale; il entreprit de renouer les liens que le traité de Berlin avait rompus entre les trois fractions du peuple bulgare et de faire de l’exarchat le foyer de la nationalité. La guerre avait détruit ce qui subsistait de l’organisation religieuse et scolaire bulgare. Mgr Joseph se donna pour tâche de réorganiser les écoles et d’obtenir du gouvernement ottoman des « bérats » d’investiture pour installer de nouveaux titulaires sur les sièges épiscopaux bulgares de la Macédoine. Le gouvernement de Sofia combinait son action avec celle l’exarque; mal vu à Saint-Pétersbourg, il cherchait à se rapprocher de la Porte et de la Triple-Alliance. Cette politique, qui caractérisa le gouvernement de Stamboulof, donna d’heureux résultats : à partir de 1882, le gouvernement ottoman