DE LA QUESTION d’oRIENT 49 tastrophe prochaine do l’Empire ottoman, ses paroles si nettement en opposition avec celles qui venaient des autres capitales, contredisaient ses déclarations et laissaient pressentir que, comme le Tsar en 1877, le gouvernement de la Reine se préparait à « agir seul. » Tandis que l’opinion publique manifestait un enthousiasme indescriptible et réclamait des solutions immédiates, le 19 novembre, lord Salisbury, après avoir lu la lettre où le Sultan promettait de faire des réformes, prenait un accent encore plus dur : « Il faut expier de longues années d’erreur, s’écriait-il, et une loi cruelle veut que l’expiation retombe sur ceux qui ont commis les fautes. » Un pareil langage, dans une telle bouche., ne pouvait manquer d’avoir dans tout l’Em-pire ottoman le plus dangereux écho; partout, en Macédoine, en Crète, les rapports des consuls signalaient l’agitation qui précède d’ordinaire les grandes crises. « S’il se proposait, écrivait excellemment M. Francis Charmes dans sa Chronique de la Revue des Deux Mondes du 1er décembre, d’entretenir l’insurrection arménienne, de lui envoyer un encouragement officiel et de provoquer, dans d’autres parties de l’Empire, soit sur le continent, soit dans les îles de la Méditerranée, des révoltes et des soulèvements nouveaux, à coup sûr, lord Salisbury ne parlerait pas autrement. » Contre les intentions que paraissait révéler le langage du Premier ministre de la Reine, la seule contre-mine efficace était une union étroite du concert européen qui garantirait au Sultan l’intégrité de ses Etats, mais qui interviendrait énergiquement auprès de lui pour obtenir la fin d’atrocités qui révoltaient les consciences civilisées et la réalisation d un programme de réformes dont les Arméniens