AU SEUIL DU XXe SIECLE 291 d’une action en Autriche avec la même décision que Bismarck préparait, dès 1867, la guerre contre la France, il n’y a pas de doute que, paraissant céder à l’appel des Germains, ses frères, il n’aille, lui, l’empereur des Germains (voir dépêche à Mommsen, p. 244), à la tête de ses troupes, « rétablir l’ordre » et « protéger la paix ». Cette éventualité, que les précédents de la politique prussienne rendent si vraisemblable, peut surgir d’un instant à l’autre. L’empereur François-Joseph est âgé de soixante-dix ans. Sans doute, très vigoureux, il est encore grand chasseur et bon cavalier, mais il n’en est pas moins sujet aux multiples accidents qui menacent les vieillards. On ne saurait d’ailleurs oublier qu’en juillet 1899, son état a été assez grave pour que l’archiduc François-Ferdinand, l’héritier présomptif du trône, ait renoncé au voyage qu’il devait faire en Bussie. | 2. — Une autre hypothèse, celle-là complètement indépendante de la personne de François-Joseph, explique dans quelles circonstances l’intervention violente de l’Allemagne en Cisleithanie pourrait avoir lieu. Pour concevoir clairement cette hypothèse, il faut d’abord tenir compte de l’état d’esprit déterminé chez les Allemands par le mouvement pangermaniste et considérer ensuite que la période présente tient en suspens des événements tels que le gouvernement de Berlin, se voyant en condition d’agir en Autriche, avec une sécurité presque absolue, n’hésiterait pas, conformément aux traditions prussiennes séculaires, à profiter d’une « occasion unique ». Quels peuvent en être les éléments générateurs? C’est ce qu’il s’agit de préciser. Dans une Europe normale, où tous les grands États, dirigés par des gouvernements vraiment nationaux, entretiennent avec soin leur appareil militaire, une action soudaine de l’Allemagne en Autriche ne se conçoit pas ; il est