AU SEUIL DU XXe SIÈCLE 271 avec joie par les députés, qui, comme nous l’apprend M. de Stumm-Halberg, n’hésitèrent pas à soutenir la loi en déclarant la nécessité d’assurer le développement de l’Allemagne depuis le Belt jusqu’à l’Adriatique. Il faut d’ailleurs admettre que cet argument est celui qui a agi puissamment sur le public, car le 7 mars 1899 l’Éclair recevait de Berlin cette fort intéressante dépèche : « Pour obtenir le vote des dépenses de cette nature, déjà sollicitées du Parlement, la presse officieuse allemande avait l’habitude d’influencer le sentiment public en lui montrant les sacrifices continuels de la France en vue d’accroître sa puissance militaire et en lui signalant, avec un grand luxe de commentaires, tout ce qui pouvait faire croire à l’influence persistante de l’idée de revanche... Actuellement,il semble au contraire qu’on évite avec soin en Allemagne de froisser les susceptibilités françaises, et l’on n'invoque plus, pour décider les députés à desserrer les cordons de la bourse, que la puissance des partis militaires en Russie et en Autriche ou les conséquences possibles pour la paix européenne de la mort d'une ou deux personnalités. » Impossible de dire plus explicitement que la loi militaire de 1899 a été motivée par l’hypothèse de la succession d’Autriche. § 7. — Cet ensemble de paroles précises et de faits certains, concordant avec les manifestations prussophiles en Autriche, pourrait paraître suffisant pour conclure. Il est rare qu’en politique étrangère la ligne suivie par un gouvernement s’indique avec autant de netteté. On peut cependant encore tirer de l’orientation donnée par Guillaume II à sa politique extérieure un élément de jugement fort utile. La courte période qui a eu pour point de départ l’événement de Fachoda est féconde en enseignements. Incontestablement, l’empereur allemand a su tirer un excellent parti de l’animosité justifiée que les Anglais, avec