AU SEUIL DU XX" SIÈCLE 167 consentir à une réforme qui, sous une apparence économique, comporterait, à brève échéance, le renoncement à leur idéal politique. Assurément, l’industrie autrichienne aurait, en principe, la faculté de vendre scs produits, elle aussi, dans toute l’étendue de l’union douanière, et d’utiliser les ports d’expédition de la mer du Nord; mais ces avantages ne seraient-ils pas rendus pratiquement illusoires par le seul fait que les conditions moins favorables de la fabrication autrichienne ne lui permettraient pas de concurrencer utilement l’industrie allemande ? Ce serait celle-ci, au contraire, qui, sans obstacles, atteindrait la Méditerranée, les pays balkaniques et l’Orient. Les produits des sujets de Guillaume II feraient alors un mal plus grand qu’aujourd’hui à l’industrie cislei-thane, d’abord sur le sol même de l’Autriche, et ensuite dans les pays qui constituent encore ses débouchés extérieurs. L’industrie autrichienne non seulement perdrait ainsi les places qu’elle a su se conserver en Hongrie et dans les Balkans, mais il lui faudrait renoncer même à l’espoir de retrouver au loin les débouchés qu’elle vient de perdre sur le continent. « Ce que nous avons perdu dans les Balkans, dit le Dr Grunzel, nous pouvons le retrouver largement en Asie Mineure. Aucun État n’est mieux situé que l’Autriche pour exploiter ce pays (1). » Cette vue est juste, et elle le restera tant que l’Autriche conservera les avantages de sa situation territoriale; mais ce serait les perdre que de donner aux produits de l’empire allemand le libre accès de l’Adriatique, puisque ce serait leur permettre d’atteindre 1 Orient comme ceux de l’Autriche, mais en bénéficiant en plus de l’avantage d’une fabrication moins onéreuse. L’industrie autrichienne a donc, semble-t-il, des raisons (1) « Was wir am Balkan verloren haben, konnten wir in Kleinasien feichlich wieder einbringen — undkein Staat ist in Folj;e seiner Lage beru-fener, dort als Pionnier aufzutreten, als gerade Oesterreich.. ». Dr Grunzel : Die wirtschaftlichen Verhàltnisse Kleinasiens, p. 4. Dorn, Vienne, 1897.