AU SEUIL DU XX* SIÈCLE 143 fâcheuses conséquences. Si le gouvernement de Vienne ne comprend pas enfin son intérêt et ses devoirs, il est à redouter que le terrorisme pratiqué par les Prussophiles ne parvienne à arrêter, au moins momentanément, l’acceptation de « fédéralisme » par ceux des Allemands autrichiens dont j’ai signalé plus haut la sagesse politique. (V. p. 38.) Les Allemands loyalistes sentent nettement l’imminence et la portée de ces dangers. Pour les rendre impossibles, ils voudraient former un grand parti autrichien. Ce titre dit tout son programme. M. Lueger en serait le chef. Malheureusement, les récentes déclarations antislaves du bourgmestre de Vienne semblent indiquer qu’il n’a pas encore absolument dégagé les conditions inéluctables d’existence d’un tel parti. Il est clair cependant qu’un parti autrichien ne pourra subsister que s’il a pour base l’égalité de traitement (Gleichberechtigung) des diverses nationalités, seul moyen d’établir un modus vivendi entre Slaves et Allemands. Les circonstances inquiétantes de la période actuelle donnent un intérêt tout particulier aux élections qui ont lieu actuellement. Comme par le passé, les Tchèques réclament le respect du droit d’État de la Bohême, l’application de l’article 19 de la Constitution de 1867 (I) et la concession de l’autonomie administrative. Les points de vue des Allemands sont divers. Beaucoup de députés modérés, précisément une partie de ceux qui acceptaient le « fédéralisme », lassés par les luttes et les injures des dernières années, ont renoncé à se présenter devant leurs électeurs. Cette attitude est fort regrettable. Ils laissent ainsi la place à des candidats ardents, disposant de grands moyens et qui, plus ou moins, dépendent du groupe Schônerer. Le programme de ces derniers comporte la rupture du pacte dualiste (l’Autriche serait rattachée à la Hongrie par le simple lien personnel du souverain), la Sonderstellung de la (1) V. p. 16. û