392 L’EUROPE ET LA QUESTION D’AUTRICHE est trop jalouse de son individualité historique et de son indépendance nationale. « Le Pangermanisme est redoutable; le Panslavisme politique ne l’est pas, et, le serait-il, la France ne saurait en souffrir. La France peut donc accorder ses sympathies aux Slaves d’Autriche qui n’ont pas encore renoncé à la pensée de garantir leur individualité historique et nationale par la création d’une Autriche fédérale. Seule une fédération est capable d’assurer à ses peuples, aux Slaves comme aux Allemands, leur autonomie administrative et une véritable liberté politique, impossibles à réaliser tant qu’une seule nation dominera en Autriche. » La question d’Autriche est économique. Jusqu’à présent, l’agriculture française a trouvé en Allemagne un important débouché, mais c’est uniquement parce que l’Allemagne est dépendante de l’étranger pour les produits de consommation. Du jour où les riches régions agricoles de l’Autriche seraient comprises dans les frontières de l’empire allemand, celui-ci, ayant un intérêt certain à s’affranchir de toute dépendance extérieure, pourrait, en favorisant l’élevage et la culture dans sa nouvelle acquisition, se passer dans une large mesure des produits français. Ces conséquences pour l’agriculture française de la réunion de l’Autriche à l’Allemagne, qui d’ailleurs ne se produiraient point brusquement, seraient relativement peu de chose en comparaison de celles qu’auraient à subir l’industrie et le commerce français dont les conditions fondamentales seraient certainement bouleversées par la simple extension du Zollverein à la Cisleithanie. L’empire allemand est de plus en plus l’adversaire commercial de la France. Déjà les industriels français ont une grande peine à lutter contre les produits d’outre-Rhin. Or, la création du Zollverein de l’Europe centrale devant améliorer, dans des proportions considérables, les conditions de la fabrication allemande, de ce seul fait les conditions