304 L’EUROPE ET LA QUESTION D’AUTRICHE puisque, actuellement même, les événements d’Extrême-Orient peuvent la faire naître d’une façon inattendue, soit de troubles dans les Balkans. Or, il faut bien se rendre compte qu’en cas de conflagration générale, quelle qu’en soit d’ailleurs la cause, toutes les « questions » extérieures latentes en Europe reviendraient subitement à la surface du terrain politique. Les forces militaires étant mises en action pour la satisfaction des ambitions de chacun, il est difficile d’admettre que les Allemands ne chercheraient pas alors à satisfaire celle qui, chez eux, prime de plus en plus toutes les autres. Si l’on se place au point de vue allemand, tous ces événements admissibles (diminution de la puissance militaire française, guerre franco-anglaise, conflagration générale résultant de l’accord anglo-allemand ou de tout autre motif) peuvent se produire isolément ou se combiner entre eux, pour déterminer brusquement l’existence d’une « occasion unique » . Il reste à savoir si Guillaume II est homme à en profiter. Indiscutablement, depuis qu’il est sur le trône, le souverain allemand a donné des preuves répétées de son esprit de décision et de son habileté à tirer parti des circonstances. Son attitude à l’égard des Arméniens, des Boërs, le régime de fer qu’il impose actuellement à ses sujets polonais, établissent péremptoirement que les considérations sentimentales sont pour lui sans valeur. Réaliste autant que Bismarck, il est bien, malgré des divergences de pure apparence, son élève et son continuateur. « Il a un plan politique qu’il cherche à exécuter de son mieux, et ce plan a uniquement pour but de renforcer la puissance allemande, sans se demander si son exécution entraîne la ruine d’autres nations (1). » Il fait chanter par son chancelier M. de Bidow un perpétuel Hosanna! à la politique d’intérêt ; il sait « que ce qui (1) Y. VIndépendance roumaine, 25 novembre 1900.