78 L’EUROPE ET LA QUESTION D’AUTRICHE Or pratiquement, l’idée d’extension du Zollverein s’applique d’abord à l’Autriche et ainsi se superpose exactement à la partie principale du programme pangermaniste, qui, perdant alors tout caractère vague et sentimental, devient une conception précise et utilitaire. Le rattachement de l’Autriche à l’empire allemand n’est donc plus seulement un procédé de compression du « Slavisme », mais encore un moyen d’assurer l’avenir économique de l’Allemagne. Ses partisans affirment en effet que la création du Zollverein de l’Europe centrale permettra seule à l’Allemagne d’affranchir son industrie de la dépendance des débouchés russe, anglais et américain. Il convient ici de remarquer à quel point l’idce d’extension du Zollverein est devenue un instrument d’acquisition de puissance politique dans les mains des Hohenzollern. C’est la Prusse qui, la première, a conçu le Zollverein, qui a commencé à le réaliser en supprimant, en 1818, ses douanes intérieures et qui, par des agrandissements successifs, notés sur la carte ci-contre, est arrivée à dominer le territoire économique de l’empire allemand actuel. C’est l’agitation protectionniste de Frédéric List qui a rendu possible l’œuvre d’Otto de Bismarck (1) ; maintenant qu’il s’agit de préparer un accroissement nouveau de la puissance prussienne, c’est le Dr Hasse, président de l’Union pangermanique, qui fait campagne avec énergie pour étendre le Zollverein à l’Autriche. Il est en tout cas certain que, dissimulée sous l’idée d’extension du Zollverein, l’idée d’agrandissement de l’Allemagne pénètre facilement les « sphères » officielles les plus hostiles. Les industriels et les commerçants y voient l’accroissement de leurs débouchés et les agriculteurs se disent : « Le jour où les régions agricoles de l’Autriche, jointes à l’empire allemand, diminueront sa dépendance de (1) Ohne Fiedrich List kein Otto von Bismarck. Alldeutsche Blätter, 1895, p. 165.