AU SEUIL DU XXe SIÈCLE 315 Aucun peuple plus que « le peuple allemand n’est dans la main de son gouvernement » (1). La désinvolture avec laquelle le plus grand nombre des journaux de l’empire ont abandonné la cause des Boërssur un signe de l’empereur est une démonstration suffisante de cette vérité. Il dépend donc de la seule volonté de Guillaume II d’utiliser ces forces et de profiter de ces avantages au moment opportun. Ce serait d’ailleurs plus simple qu’on n’est tenté de le supposer. L’article 11 de la constitution de l’empire reconnaît à l’empereur allemand le droit de déclarer la guerre et d’ordonner la mobilisation, sans consulter le conseil fédéral, lorsque les territoires de la Confédération ou ses côtes sont attaqués. Il vient d’étre fait de ce droit une application qui constitue un enseignement précieux à retenir. Dans son numéro du 24 juin 1900, la Strasburger Post, organe officieux du gouvernement d’Alsace-Lorraine, faisait remarquer « que l’ordre de mobiliser les deux bataillons d’infanterie de marine pour la Chine était la première application qui ait été faite, depuis la fondation de l’empire, de l’article de la Constitution relatif à la déclaration de guerre. Or, à cette date du 24- juin, les possessions allemandes en Chine n’avaient pas été attaquées par les Chinois et l’assassinat du baron de Ketteler, représentant de l’empereur à Pékin, qui eut lieu le 18 juin, était encore complètement ignoré à Berlin. L’empereur n’en a pas moins ordonné la mobilisation, faisant de l’article 11 delà Constitution une application si large, qu’on pourrait facilement la considérer comme illégale. Il y a là un précédent qu’il faudrait ne jamais oublier. Ce qui s’est passé à l’égard de la Chine peut se reproduire à l’égard de l’Autriche. L’empereur allemand, wie immer, ohne nach dem Wie und Warum zu fragen, auf das Geheiss ihres Kaisers ihre Schuldigkeit gründlich thun. » Op. cit., p. 49. (1) « ... ist dieses Volk vollständiger als irgend eines, in der Hand seiner Regierung... » Op. c/f., p. 208.