Aü SEUIL DU XXe SIÈCLE 219 chives de la ville. Mommsen remercia dans une lettre où il dit : « Puisse votre pays se sauver, grâce à ses fidèles qualités allemandes, à la faveur des troubles actuels (1). » Les officiers, qui reflètent le mieux l’esprit du monde militaire, parlent avec une netteté plus grande encore. Le colonel de Bernhardi, ancien chef d’état-major du 16e corps, actuellement attaché au grand état-major, honoré des faveurs particulières de Guillaume II, a donné, dans une conférence sur les éléments de la guerre moderne, à la société militaire de Berlin, «la véritable formule des ambitions allemandes (2) » : « Nous reconnaîtrons que l’empire allemand nouvellement formé n’a pas encore atteint la limite de l’extension possible de sa puissance. Son unification, sa renaissance, lui ont imposé de nouveaux et impérieux devoirs que, jusqu’ici, la Prusse avait dû remplir à elle seule. Nous reconnaîtrons que sa mission historique n’est pas encore terminée, puisque cette mission consiste à former le noyau autour duquel viendront se grouper tous les éléments dispersés de la race allemande, à étendre sa sphère d’influence pour la mettre en harmonie avec ses limites politiques, à donner et à assurer au « Germanisme » la place qui doit lui revenir sur tout le globe... « Pour lui assurer cette place, nous devons avoir le courage de nous engager dans des voies nouvelles, où le flambeau de l’expérience ne viendra pas nous éclairer, où, en apparence tout au moins, il nous faudra la plus grande audace . » Le général von der Goltz, ancien chef de la maison militaire allemande en Turquie, aujourd’hui grand favori de l’empereur Guillaume, soutient identiquement la même (1) « Möge Ihr Heimatland in seiner treuen deutschen Eigenart sich durch die gegenwärtigen Stürme durchretten? » Ihr ergebenster Mommsen. Chalottenburg, 7 August, 1900. (2) Ernest Jodet. V le Petit Journal des 23 et 24 août 1900. On y trouvera de longs extraits de cette remarquable conférence.