AT SETJIL DU XX' SIÈCLE 215 inébranlable, croient-ils, de la supériorité de la race. Leur thèse est simple autant que brutale : les Allemands dominent en Autriche depuis des siècles ; ils ont apporté aux Slaves la civilisation; ce serait en compromettre les bons effets que de permettre à ceux-ci de toucher à l’ordre de choses établi. Jusqu’ici, les Habsbourg ont été les serviteurs du « germanisme » . C’est à eux qu’il appartient de maintenir les Slaves turbulents dans leur situation passée. Si les Habsbourg échouentdans cette mission, ils se condamnent à disparaître, car alors ils travaillent eux-mêmes à la décomposition de l’Autriche et ils la conduisent à un démembrement qui, de toute nécessité, rattachera les provinces allemandes de la Cisleilhanie à l’empire allemand. Cette thèse, unanimement soutenue par la presse de l’Allemagne, même par les organes qui ne se piquent pas de Pangermanisme, est celle que les agences télégraphiques de Berlin diffusent à l’étranger. Le mécanisme de l’opération, qui peut paraître très compliqué, est en réalité fort simple . « Les agences télégraphiques sont plus ou moins les instruments officieux des gouvernements, qui ne se font pas faute de leur faire dire ce qu’ils veulent. En outre, une critique serrée des dépêches a lieu avant que celles-ci soient transmises aux intéressés, et il s’opère ainsi dans l’ombre un travail qui n’a rien de particulièrement édifiant. Telle nouvelle qui présenterait un grand intérêt pour le public est soigneusement éliminée. D’autres sont soumises à un maquillage étrange. En résumé, les journaux ne sont pas mis au courant de ce qui se passe, mais bien de ce qu’il convient aux gouvernements de leur laisser savoir (1). » Or, à Berlin, c’est surtout le bureau Wolff qui est dans la main du gouvernement. Il lui est d’autant plus facile d’impressionner, comme il l’entend, les lecteurs du monde entier, que presque toutes les agences télégra- (1) L'Art de rédiger, cFadministrer et d’imprimer un journal, p. 59. Soullier, Genève, 1900.