AU SEUIL DU XX” SIÈCLE 151 lement que par l’ouest dans les pays autrichiens, débouché indispensable par le fait qu’il est unique. Ne serait-il pas gravement compromis, le jour où la Galicie serait séparée du reste de la Cisleithanie ? Si l’on suppose même qu’aucune barrière douanière, au sens strict du mot, ne soit établie, il n’en est pas moins évident que, sous quelque forme qu’on la suppose, cette séparation serait moins propice au trafic galicien que le régime actuel. La Galicie aurait-elle au moins la possibilité de vendre à la Hongrie ce que lui refuserait l’Autriche? Mais, encore plus que la Galicie, la Hongrie vit de ses exportations agricoles et le gouvernement de Buda-Pesth met un soin jaloux à défendre le commerce magyar. Consentirait-il à admettre les Galiciens au partage de cet avantage? Ce qui a lieu actuellement est la meilleure des réponses. Les temps sont bien passés où Magyars et Polonais fraternisaient. Depuis longtemps, ils ont cessé de chanter, comme en 1848 : «Nous sommes frères pour boire et pour nous battre. » L’âpreté des luttes économiques a eu raison des sentiments, et aujourd’hui les Hongrois ne témoignent aux Polonais qu’un égoïsme raisonné. Un fait topique l’établit. Les Hongrois exportent une grande quantité de bétail et de porcs. Pour protéger cet élevage, l’une des principales sources de richesse du pays, le gouvernement de Pesth a imaginé un procédé dont se plaignent fort les éleveurs galiciens. La douane n’existant pas entre la Galicie et la Hongrie, les animaux polonais peuvent, théoriquement du moins, venir en toute liberté sur les marchés hongrois concurrencer ceux des Magyars. Pour faire obstacle à cette concurrence, les gens de Pesth ont imaginé d’installer aux quelques passages des Carpathes, par où se font les importations d’animaux galiciens, des stations sanitaires, destinées en principe à empêcher le bœuf ou le porc galicien de venir contaminer son congénère hongrois. Cette précaution toute moderne est irreprochable, mais, par une coïncidence au moins eu*