PRÉFACE XI Ce qui s’est fait avant 1870 se continue actuellement. Les opinions les moins fondées sur l’état vrai de l’Europe centrale sont entretenues avec soin dans tout le continent et spécialement en France. Aussi le Français renseigné uniquement par les feuilles publiques se fait-il une idée fausse de l’empire des Habsbourg. Pour lui, l’Autriche est un pays polyglotte, de majorité allemande, — raison pour laquelle il fait partie de la triple alliance. — Le conflit de ses diverses nationalités le dissout et prépare son démembrement. Seule, l’action personnelle de l’empereur François-Joseph maintient encore ce bizarre assemblage de peuples, mais le jour de sa disparition, l’Autriche se divisera d’elle-même, et ses provinces allemandes par une attraction toute naturelle iront se fondre dans l’empire allemand. 11 y a là, en perspective, un grand danger pour l’Europe et pour la France, mais il est inévitable. Telle est l’opinion généralement admise. La longue enquête à laquelle je me suis livré sur place m’a démontré que si un semblable jugement ne correspondait nullement à la situation vraie de l’Autriche, il était par contre merveilleusement approprié à servir les vues des vainqueurs deSadowa. J’en ai conclu qu’il était le résultat des efforts depuis longtemps poursuivis par les agences télégraphiques en vue d’égarer les esprits. Le présent ouvrage est consacré à établir la vérité de cette conclusion. Il vise en outre un but plus élevé. Si la France ne peut plus diriger les événements extérieurs et est réduite à en subir les coups et les contrecoups, c’est que l’opinion, n’étant jamais documentée à temps, est dans l’impossibilité d’exprimer sa volonté,