AU SEUIL DU XXe SIECLE 255 à l’empereur allemand le grade le plus clevé de toute l’armée autrichienne. Les discours de l’empereur donnent la véritable valeur de ces indices généraux. La suite de leurs dates établit la progression rapide des ambitions qu’ils révèlent. Dès les premières années de son règne, la Fortune comble le jeune empereur allemand. Celui qui était destiné à être son plus redoutable adversaire, Alexandre III, meurt. La puissance allemande grandit sur tous les points du monde. Aussi, au début de 1896, Guillaume II peut-il à bon droit pousser ce cri de triomphe : « L’empire allemand est devenu un empire universel (1). » Il ne s’illusionne pas II sait que seule la force permet de soutenir et de développer un tel empire. Il le proclame : « Appuyé sur l’armée et confiant en notre Dieu puissant, j’ai entrepris ma lourde tâche, sachant bien que l’armée était le soutien principal de mon pays et la plus solide colonne du trône prussien (2). » La préparation de la guerre devient sa constante préoccupation. Sans jamais hésiter, il engage les dépenses militaires les plus considérables. On a calculé que, dans les huit premières années de son règne, Guillaume II a dépensé pour l’armée et pour la marine 5,926 millions de marks, alors que son grand-père, le vainqueur de Sedan, dans les huit dernières années de sa vie, n’en a dépensé que 4,114, ce qui fait un excédent de 1,812 millions de marks motivé pour la plus grande partie par la seule personnalité de l’empereur actuel. A partir de 1898, on observe que le mot de Germanie remplace généralement celui d’Allemagne dans les discours impériaux, qui, par leur intempérance même, commencent à dévoiler les idées fondamentales de Guillaume II. Le 28 août 1898, répondant au discours du bourgmestre de Mayence, il déclare vouloir maintenir intact l’héritage que (1) « Aus dem Deutschen Reiche ist ein Weltreicli geworden. » Tonst porté par Guillaume II à Berlin, le 18 janvier 1896. (2) Guillaume II à la garde, juin 1898.