80 L’EUROPE ET LA QUESTION D’AUTRICHE de Guillaume II, Mgr Kopp, prince évêque de Bresiau. Le raisonnement des catholiques, qui forment ses troupes, peut se résumer ainsi : Dans l’empire allemand actuel, nous sommes 17 millions 1/2 de catholiques contre 31 millions de protestants; sur les 9 millions d’Àllemands, sujets de François-Joseph, 500,000 seulement sont évangélistes ; le jour où l’Autriche serait incorporée à l’empire allemand, nous serions 26 millions de catholiques contre 31 millions 1/2 de protestants. Non seulement alors nous leurs tiendrions tête, mais nous formerions un État catholique compact au centre de l’Europe, et finalement Rome serait amenée à prendre son point d’appui en Allemagne au lieu de s’obstiner à le conserver en France, dont le gouvernement lui est hostile. Notre intérêt est donc d’être pangermanistes. Jadis une telle façon d’envisager les choses eût été sans valeur; mais aujourd’hui, étant données les circonstances nouvelles, il faut lui attribuer une importance considérable. Le temps n’est plus où l’Allemagne, par crainte d’augmenter le nombre de ses sujets catholiques, n’aurait même pas envisagé l’hypothèse de s’étendre en Autriche (1). l/argument fut juste autrefois; il a cessé de l’être depuis que toutes les conditions de la vie politique de l’Allemagne sont radicalement changées; l’heure du Kulturkampf est passée ; le prince de Bismarck a quitté le pouvoir ; Guillaume II s’est passionné pour la Weltpolitik, il cherche à mettre l’irilluence de Rome au service de l’expansion commerciale de son empire en Orient et en Extrême-Orient ; à Berlin, les avantages économiques priment désormais toutes les considérations religieuses. (1) « ... Le prince de Bismarck... ne peut pas non plus souhaiter (l'aggraver les difficultés religieuses de l’empire germanique, en y introduisant un élément catholique aussi important que celui de l’Autriche allemande et des territoires intermédiaires. » Sir Charles Dilke, l’Europe en 1887, p. 183. Quantin, Paris, 1887.